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Le Père Feeney, les “Frères” Dimond et l’enseignement de l’Église sur le dogme “Extra Ecclesiam nulla salus” et les baptêmes de désir et de sang
— Partie I —
Le Père Feeney, les “Frères” Dimond et l’enseignement de l’Église sur le dogme “Extra Ecclesiam nulla salus” et les baptêmes de désir et de sang.
« “Les laïcs peuvent être trompés, mais les clercs se trompent difficilement sans être de mauvaise foi, surtout si cela dure longtemps” (Mgr de Castro-Meyer). En effet un clerc a tous les livres disponibles pour vérifier sa position. » (citation tirée de la page 72 du livre “Quarante ans d’erreurs. Réfutation des arguments erronés concernant l’infaillibilité de l’Église” de l’abbé Michel Marchiset)
Partie I : Introduction
Le dogme “Hors de l’Église, point de salut”, les baptêmes de désir et de sang, le Père Feeney, les “Frères” Dimond, …, voici un univers qui m’est déjà familier depuis quelques années.
En effet, je me connectais alors régulièrement sur le site Internet des “Frères” Dimond pour lire chaque semaine “l’hérésie de la semaine” de Benoît XVI. Trouvant cette rubrique intéressante, j’avais alors commandé un de leurs ouvrages. Je reçus non seulement cet ouvrage mais également divers DVD et publications en sus.
Cet ouvrage était le fameux livre du “Frère” Michael Dimond, « Outside the Catholic Church, there is absolutely no salvation ». Je lus assez rapidement ce livre en anglais. À première vue, la foule de citations (plus de 700) jointe à l’autorité même de ces citations (Conciles, Papes, …) font penser que l’auteur a raison. Néanmoins, une fois terminé ce livre, un malaise certain m’avait envahi !!! En effet, on apprenait pêle-mêle que saint Thomas d’Aquin, saint Alphonse de Liguori, saint Ambroise, …, divers Papes dont Pie IX et Pie XII, …, le catéchisme du Concile de Trente, le code de droit canon de 1917, …, étaient tous dans l’erreur. Je compris alors que pour imposer sa thèse sur le dogme “Hors de l’Église, point de salut” et sur les baptêmes de désir et de sang, le “Frère” Dimond se devait de détruire méthodiquement tout ce qui la contredisait.
Quelques lectures supplémentaires sur l’Internet me firent découvrir que les thèses du Père Feeney, reprises et propagées par les “Frères” Dimond, étaient un véritable objet de discorde parmi les “traditionalistes” anglophones. Des discussions sans fin inondent les forums. Des milliers de pages de controverse leur sont dédiées. Les anathèmes et noms d’oiseaux volent ! Bref, c’est une véritable pétaudière qui était jusqu’alors inconnue du monde francophone.
Inconnue jusqu’à l’apparition du site “la-foi.fr”. Ce site a traduit une bonne partie des travaux des “Frères” Dimond et a donc rendu possible la diffusion dans le monde francophone des hérésies du Père Feeney et de ses successeurs.
Puis, début 2014, un abbé m’apprenait que plusieurs de ses fidèles avaient déserté sa chapelle car ces derniers étaient devenus Feeneyistes. Triste constat : cette hérésie strictement circonscrite au monde anglophone s’était maintenant répandue chez nous, en France !
Au début du mois de mai, on me sollicita pour donner une conférence lors de la session antilibérale organisée par les ACRF en août. J’acceptai volontiers et proposai de faire une conférence sur le Père Feeney.
Peu après, j’appris que l’abbé Marchiset aurait embrasé les hérésies du Père Feeney. Je restai un peu circonspect… mais peu de temps après vint la confirmation de cette funeste nouvelle par la réception d’un document adressé à ses fidèles par l’abbé Marchiset déclarant qu’il soutenait dorénavant les hérésies du Père Feeney et des “Frères” Dimond.
Stupeur, tristesse et consternation !
Les sessions antilibérales dans le prieuré de l’abbé à Mouthier-Haute-Pierre ! Les processions du 15 août ! Les Messes dans la crypte rénovée du prieuré ! Les sermons antilibéraux publiés à travers Fidem Servavi. Le rédacteur courageux des débuts de Virgo-Maria. La dernière retraite pour hommes de l’abbé Vérité. Une veillée pascale au prieuré. Quelques nuits bien fraîches passées au prieuré en hiver. Les merveilleux paysages de la vallée de la Loue. Le trentain célébré pour le repos de l’âme d’un membre de ma famille, …
L’abbé Marchiset, c’était tout cela ! Plus qu’un prêtre, c’était un ami !
Nos chemins se séparent maintenant irrémédiablement. Du moins tant que l’abbé Marchiset suit – malheureusement – la voie de l’hérésie. Seul ou presque face à l’enseignement de l’Église (ce fameux Magistère Ordinaire Universel qui servit pourtant de sujet au livre “Quarante d’erreurs” à ce même abbé !!!). La preuve en est dans son sermon du 4ième dimanche après la Pentecôte de cette année. Non possumus.
Les quelques articles qui suivront cette introduction seront bien évidemment dédiés en particulier à l’abbé Marchiset. Nous avons l’espoir que nos travaux, tout imparfaits qu’ils le sont, l’aideront à revoir sa position. Je demande donc à tous nos lecteurs de prier spécialement pour monsieur l’abbé. Beaucoup d’entre nous ont directement ou indirectement bénéficié à un moment ou à l’autre de notre vie de ses bons services (Pensons par exemple à son livre sur l’infaillibilité). À notre tour de le lui les rendre.
Ainsi donc vont paraître, dans les prochaines semaines, divers articles sur le Père Feeney et les hérésies actuelles sur le dogme “Hors de l’Église, point de salut” et les baptêmes de sang et de désir. Ces articles sont pour la plupart tirés de la conférence prononcée en août. Ils ont été retravaillés pour une publication écrite.
Nordland.
(à suivre…)
Mise au point de l’abbé Anthony Cekada sur l’hérésie appelée « feeneyisme »
Monsieur l’abbé Anthony Cekada nous a remercié (notre ami traducteur tout particulièrement !) d’avoir effectué la traduction et la publication en français de son étude sur l’hérésie appelée « feeneyisme »… « Baptême de désir et Principes Théologiques ». Il a par la même occasion souhaité y inclure une note destinée aux lecteurs de langue française :
Baptême de désir et Principes Théologiques
(2000)
par l’abbé Anthony Cekada
Note à l’attention des lecteurs francophones [2014] : pour des traditionalistes francophones, l’expression « hérésies américaines » évoque tout naturellement l’américanisme, condamné par Léon XIII, ainsi que la notion de liberté religieuse proposée par le jésuite John Courtney Murray, puis adoptée par Vatican II.
On connaît moins en Europe l’hérésie appelée « feeneyisme », d’après le nom du jésuite bostonien Leonard Feeney (1897-1978). Apparu en réaction au libéralisme des jésuites de l’université de Harvard dans les années quarante et cinquante, le feeneyisme était censé avoir découvert la « véritable » signification de l’enseignement Extra Ecclesiam nulla salus (Hors de l’Église, point de salut), signification dont ses adeptes prétendaient qu’elle avait été « déformée » par les théologiens catholiques des siècles durant. Les « feeneyistes » en vinrent à nier l’enseignement catholique sur le baptême de désir et le baptême de sang.
Né dans l’atmosphère puritaine de la Nouvelle-Angleterre protestante, le feeneyisme a toujours été une hérésie « de laïcs ». Il n’a réuni autour de lui qu’une poignée de partisans dans le clergé catholique des États-Unis, car même le plus ignorant des prêtres catholiques américains savait, d’une part qu’il était impossible de nier des doctrines contenues dans le catéchisme et enseignées depuis des siècles par les théologiens catholiques, d’autre part qu’on pouvait encore moins prétendre que la « véritable » signification de la doctrine « Extra Ecclesiam nulla salus » fut restée cachée aux catholiques pendant des siècles pour n’être découverte qu’en 1940 par des laïcs de Boston !
Bien que leurs idées eussent été condamnées en 1949 par une lettre du Saint-Office, les feeneyites ont initialement réussi, dans une certaine mesure, à infiltrer le mouvement traditionaliste en Amérique après Vatican II. En tant que jeunes prêtres membres de la FSSPX dans les années soixante-dix, nous avons eu plusieurs occasions de rencontrer des feeneyites qui tentaient secrètement de répandre leurs erreurs au sein des congrégations.
Durant ces années, les propagateurs les plus visibles des erreurs feeneyites étaient associés au St. Benedict Center, situé en Nouvelle-Angleterre. Aujourd’hui, malheureusement, leurs erreurs reçoivent une audience bien supérieure de la part du « frère » Michael Dimond, du Most Holy Family « Monastery », institution se composant uniquement de lui-même et de son frère de sang, ni l’un ni l’autre n’ayant reçu la moindre formation théologique. De crainte que le nom de cette organisation n’évoque aux fidèles français des visions de Solesmes ou de Fontgombault, force est d’avertir ceux-ci que l’essentiel de la vie monastique « bénédictine » des deux frères se passe sur YouTube et sur un site Internet. Omne ignotum pro magnifico !… Bien que le « frère » Dimond se qualifie de « sédévacantiste », les lecteurs français doivent savoir aussi que les prêtres sédévacantistes d’Amérique, de quelque sensibilité qu’ils se réclament (et nous sommes nombreux), répudient ses opinions.
Je crois savoir que les feeneyites se servent désormais de l’Internet pour répandre leurs erreurs dans le monde francophone. C’est pourquoi un ami a fait en sorte que l’article ci-après soit traduit en français pour le bénéfice de nos amis traditionalistes francophones.
L’article fait état d’un dossier comprenant des photocopies des travaux de docteurs de l’Église et de théologiens concernant le baptême de désir et le baptême de sang. Nous espérons pouvoir en mettre prochainement une version pdf sur l’Internet.
Je tiens enfin à ajouter, à l’adresse de nos lecteurs francophones, l’avis pratique que voici : étant donné que (comme le démontre l’article ci-après), l’erreur sous-jacente des feeneyites tient à ce qu’ils rejettent les critères fondamentaux dont use la théologie catholique pour séparer la vérité de l’erreur, il est inutile d’argumenter avec eux sur la signification de textes particuliers (Boniface VIII, le Concile de Florence, etc.), car il n’existe tout bonnement aucun terrain de discussion commun avec eux. Les feeneyites vivent en effet sur une planète théologique fonctionnant selon ses propres règles, de sorte que débattre avec eux au sujet de la signification d’une déclaration magistérielle revient, malheureusement, à débattre des mérites d’une symphonie de Mozart avec un Martien sourd.
L’abbé Cekada nous a, par la même occasion, transmis un document complémentaire :
Le baptême de désir, un acte de parfaite charité ou contrition
Question : En ce qui concerne le baptême de désir et de sang, lorsque j’aborde ce sujet avec un prêtre sur un site Internet traditionaliste en disant que j’y crois, on me taxe d’hérésie. Lorsque, sur un autre site Internet traditionaliste, je dis que je n’y crois pas, on me taxe d’hérésie aussi.
Je suis très sérieux. Je ne sais que penser à ce sujet. Si seulement je connaissais la vérité entière, je n’aurais plus aucun doute, car jamais de toute ma vie, je n’ai douté de la plus petite chose qu’on m’avait enseignée en matière de foi.
Qu’en est-il de la doctrine « Hors de l’Église, point de salut » ? On m’a appris que si des catholiques apostats ne réintégraient pas l’Église avant de mourir, ils allaient en enfer ; que les protestants, les musulmans, les Juifs, etc. allaient en enfer s’ils n’entraient pas dans l’Église avant leur mort ; que si Dieu voulait qu’une âme se sauve, Il lui envoyait un « prêcheur » pour le faire entrer dans l’Église catholique. On m’a appris la nécessité d’aller au-devant des âmes pour les conduire à la vérité de l’Église catholique. Je ne suis pas certain même de cette partie de la foi que l’on m’a enseignée quand j’étais enfant.
Les cinq derniers papes disent qu’on n’a pas besoin d’être catholique pour être sauvé, que les protestants, les Juifs et d’autres encore n’ont pas besoin de se convertir avant leur mort, etc.
Si ce qu’on m’a appris concernant cette doctrine est faux, je me demande bien ce qu’on m’a encore appris de faux quand j’étais enfant. Peut-être que je ne connais pas du tout ma foi catholique. Comprenez-vous le dilemme qui est le mien ?
J’ai toujours accepté tout ce qu’on m’a enseigné sur ma foi quand j’étais enfant sans me poser la moindre question ni éprouver le moindre doute, et je ne pouvais tolérer ceux qui ne croyaient pas tout en ne se posant aucune question. Je pourrais accepter que le baptême de sang et de désir est une vérité si seulement je savais que c’est bel et bien une vérité.
RÉPONSE : Ne soyez pas malheureux si vous ne vous souvenez pas de tout ce qu’on vous a appris. Personne ne le peut !
Le baptême de désir et le baptême de sang étaient bel et bien enseignés dans les anciens catéchismes. C’est l’un des signes indiquant qu’un enseignement appartient au magistère ordinaire universel, et les catholiques sont donc tenus d’y adhérer.
Aucun théologien catholique n’enseigne que ces doctrines sont contraires à l’enseignement « Hors de l’Église, point de salut ».
Q. : Vous me dites donc qu’il est juste de croire dans le baptême de désir et de sang et qu’il n’y a rien là qui aille à l’encontre de la doctrine « Hors de l’Église catholique, point de salut » ?
R. : C’est exact. Tel n’est pas le cas. Les mêmes théologiens qui enseignent cette doctrine enseignent également l’autre.
Q. : Alors, les âmes des protestants, des Juifs, etc. que Dieu n’a pas mis en contact avec la vraie Foi vont-elles au paradis si les intéressés ont vécu dignement selon leurs religions respectives ?
N’est-ce pas là une des hérésies enseignées par Benoît XVI, qui dit que les protestants, les Juifs, etc. n’ont pas besoin de se convertir à la foi catholique ?
R. : Vous ne comprenez pas. Il n’y a là aucun baptême de désir, et ce n’est pas cela que signifie la doctrine en question.
Voici une explication du baptême de désir donnée par le Père Felix Cappello S.J., qui était un théologien d’avant Vatican II :
« L’expression “baptême de l’esprit” ou “baptême de désir” [flaminis seu desiderii] désigne un acte de parfaite charité ou contrition, comportant un souhait au moins implicite de recevoir le sacrement. “Car le cœur de l’homme”, écrit saint Thomas, “est poussé par le Saint Esprit à croire en Dieu et à L’aimer, ainsi qu’à se repentir de ses péchés”.
« Ainsi, le baptême de désir sert à justifier quelqu’un en lieu et place du baptême proprement dit, car (ainsi qu’il est écrit dans notre traité sur la pénitence) en dehors du sacrement effectivement reçu, la contrition parfaite est en elle-même [per se] une disposition immédiate à la justification…
« … le baptême de désir [in voto] a lieu quand est présente l’intention au moins implicite de le recevoir [le sacrement du baptême] ; cette intention est contenue dans l’acte de charité ou de contrition, pour autant qu’elle constitue une volonté générale de satisfaire à tous les commandements divins et d’employer tous les moyens divinement institués comme étant nécessaires au salut. » (Tractatus Canonico-Moralis de Sacramentis, 4ème éd. [Rome : 1945] 1 : 110, 112.)
Autrement dit, le baptême de désir est identifié à un acte de parfaite charité ou contrition.
Q. : Qu’en est-il, dans ces conditions, du principe selon lequel nous devons aller au-devant des protestants, des Juifs, etc. pour les convertir et les faire entrer dans l’Église catholique, hors de laquelle il n’y a pas de salut ? Dans mes jeunes années, Dieu m’a envoyé au-devant de beaucoup d’âmes pour les amener, en « prêchant », à entrer dans l’Église catholique.
R. : Il va de soi que nous devons continuer à agir ainsi.
Après tout, combien de catholiques et – a fortiori de non-catholiques ont la contrition parfaite ?
Par conséquent, il faut poursuivre sans cesse l’apostolat missionnaire consistant à prêcher et à convertir les âmes à l’unique vraie foi.