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« Ab Maria » toujours !…
Interventions victorieuses de Marie dans la vie de l’Église
par le Cardinal Alfredo Ottaviani
Au Congrès Marial qui s’est tenu à Lourdes du 11 au 17 septembre 1958, l’intervention du cardinal Alfredo Ottaviani fut particulièrement remarquable. Sa péroraison a pris la mesure de la gravité de l’heure, à la veille de la mort de Pie XII, à la veille du référendum de France qui appelait tous les électeurs à ratifier l’apostasie nationale par le vote d’une constitution qui renie Jésus-Christ, à la veille de l’insolent triomphe du modernisme résurgent. Nous ne pouvons que faire nôtre ce filial appel à la Très Sainte Vierge Marie, et l’invincible espérance qu’il renferme.
Saint Jean l’Évangéliste conclut son récit du miracle de Cana par cette puissante expression : « Et crediderunt in eum discipuli eius : ses disciples crurent en lui » (Jo. II, 11). Ce ne fut donc pas au moment de leur vocation, mais c’est à cet instant qu’ils commencèrent à croire : leur foi naquit à Cana.
Permettez-moi de mettre en lumière un point particulier. À la Vierge qui insistait et ne se lassait pas d’insister, Notre-Seigneur justifie son refus par un décret divin, une disposition de la divine providence : « Mon heure n’est pas encore venue : Nondum venit hora mea » (Jo. II, 4). Elle n’est pas encore venue, l’heure fixée par le Père pour le premier prodige de son fils, pour allumer la foi au cœur des disciples, pour inaugurer au grand jour l’ère nouvelle du nouveau royaume et de la nouvelle époque, l’âge, si l’on peut dire, de l’éternel dans le temps, du divin dans l’humain. Jusqu’ici ce n’est que dans le secret et l’intimité que s’était ouverte cette nouvelle période de l’histoire, quand « le Verbe s’était fait chair ». C’est donc par Marie que furent obtenus les premiers triomphes de la foi, cette foi grâce à laquelle l’homme devient fils de Dieu.
Il existait donc une heure fixée par l’éternel conseil. Mais cette heure, Dieu avait voulu qu’elle fût anticipée par l’intervention de Marie.
Cette influence de la prière de Marie sur la Toute-Puissance divine ne nous surprend pas, mes Frères. Son Jésus n’a-t-il pas placé dans les profondeurs de l’humilité le sommet de toute grandeur possible pour la créature humaine ?
Ces considérations le prouvent : ce n’est pas par hasard que fut présente à Cana – et de quelle présence – Marie, qui a donné Jésus aux hommes. Ce ne fut pas par hasard non plus qu’elle fut présente au jour de la Pentecôte. Cette humble femme, la plus humble de toutes les femmes, nous a donné Jésus et elle continue de nous le donner au cours de l’histoire. Car elle est, en quelque façon, l’image, le type, le symbole et le modèle de l’Église, vierge et mère elle aussi, qui engendre Jésus dans les cœurs des hommes. Dans l’histoire de l’Église, on peut retrouver ce qui s’est passé dans la vie terrestre de Jésus. Marie a été sensiblement, visiblement présente aux heures les plus angoissées et les plus sombres de la foi, comme elle a été toujours l’aube lumineuse des jours de grands triomphes.
Marie ne cesse pas d’être présente et agissante dans cette Pentecôte continuée qu’est le gouvernement spirituel des âmes et l’œuvre du Magistère. Je puis vous le garantir, mes chers Frères, nulle part ailleurs Marie n’est présente comme à Rome, dans cette Rome auguste, qui met sa gloire dans l’humble service de tout l’univers, dans cette Rome qui vit pour tous ses frères les hommes, et ne connaît pas d’autre mission, d’autre salut, que d’être établie pour les autres : « Pro hominibus constituitur » (Heb. V, 1).
Ma vie tout entière, depuis les premières heures de mon sacerdoce, s’est passée dans l’humble service de ce gouvernement central et universel de l’Église. J’ose donc témoigner ici que la présence de la Vierge nous donne l’assurance de travailler dans l’Église et pour l’Église avec le Christ Jésus.
À cause de cette présence de Marie, au cours des siècles, les victoires, les lauriers, la gloire des triomphes obtenus par l’Église, souvent Rome les a attribués à Marie, à son intercession toute-puissante : « Terribilis ut castrorum acies ordinata : Terrible comme une armée rangée en bataille ». Avec Rome, l’Église tout entière s’est complue à orner de pierres précieuses la couronne contemplée par saint Jean sur son front : « In capite eius corona stellarum : Sur sa tête, une couronne d’étoiles » (Ap. XII, 1).
Permettez-moi d’évoquer, comme à vol d’oiseau, sans insister plus du nécessaire, quelques-unes de ces victorieuses interventions de Marie dans la vie de l’Église. Je parle à des âmes chrétiennes qui n’ignorent pas les étapes parcourues par la vérité dans sa marche à travers le monde, étapes qui furent autant de stations d’un douloureux chemin-de-croix. Elles savent comment Jésus a passé sa vie terrestre ; elles ont conscience de sa vie dans le secret de leur cœur : elles ont appris comment il a vécu au cours des siècles dans son Église.
Le glaive de Siméon
Le glaive de Siméon
À rapprocher avec le sermon de l’abbé de la Rocque !!!
publié ici-même, il y a quelques jours :
« Les blasphèmes pleuvent de partout »
… Plus tard eut lieu une seconde cérémonie religieuse à laquelle la Vierge ne crut pas pouvoir se soustraire alors que son Fils avait été circoncis. Le quarantième jour après la naissance de Jésus, la Vierge-Mère se rendit au temple de Jérusalem pour la purification édictée dans le Lévitique. Après s’être comportée comme si elle avait contracté la souillure légale, elle qui était plus pure que les cieux, Marie se fit relever comme les autres femmes de son peuple après la naissance de leurs enfants, en offrant, selon la taxe des pauvres, le couple de tourterelles ou les deux petits de colombe pour l’holocauste et le sacrifice d’expiation. Et comme en vertu de la Loi, son Fils ne lui appartenait plus, — Tu consacreras à Yahvé tout premier-né, disait l’Exode, et Moïse avait ajouté : Tu rachèteras tout premier né de l’homme parmi tes fils, — elle racheta son Premier-Né en versant au trésor sacré les cinq sicles d’argent.
Et vous savez quelle scène se passa à cette occasion. Un vieillard, Siméon (quelque saint prêtre, sans doute, mais qu’il n’est pas possible de mieux identifier) prit l’enfant des bras de sa mère et, éclairé d’une subite lumière prophétique, il entrevit quel serait le destin de celui qu’il élevait vers le ciel comme une hostie et quel sillage ineffaçable son passage laisserait à jamais dans la vie de l’humanité. Puis, se tournant vers Marie, il ajouta : Quant à vous, un glaive vous transpercera l’âme. La Vierge savait sans doute mieux que quiconque ce qui devait arriver et quel prix avait été statué pour la Rédemption. Mais la parole terrible de Siméon lui rappela avec une nouvelle énergie que l’heure des grandes douleurs approchait.
Essayez d’imaginer les émotions dont l’âme de la mère était le théâtre tandis qu’ils s’en retournaient et que Joseph n’avait plus de mots à cause de la parole du vieillard qui l’avait fait frissonner, émotions contradictoires qui se mêlent comme des caresses et des déchirements.
Elle vient d’enfanter dans la joie. Aucune mère n’a connu comme elle, sans mélange, la douceur de tenir un fils premier-né entre ses bras, pas même Élisabeth, sa parente, qui nourrit depuis six mois l’enfant si longtemps désiré. Les autres mères, en berçant leur enfant nouveau-né, ne pressent qu’un petit être inerte qui ne sait rien comprendre à la douceur des noms qu’elles lui prodiguent et qui ne peut répondre à leurs caresses. Mais celui qu’elle tient entre ses bras se révèle déjà comme le plus beau des enfants des hommes. Déjà le Fils et la Mère se comprennent : ils échangent d’âme à âme, mieux qu’avec le vulgaire langage, leurs témoignages de mutuelle tendresse.
Les autres mères craignent pour la fragilité d’une vie qui vient de naître, s’alarment au moindre signe, tremblent souvent pour le lendemain : pour leur enlever leur trésor, faut-il beaucoup plus que le vent de printemps qui emporte la frêle toison des amandiers en fleurs ? Marie ne tremble pas ; elle ne craint rien : rien n’est capable d’arracher son Fils à son amour ; on lui enviera ce Fils dans les yeux de qui, parfois, brille du divin.
Mais par contre les autres mères, dans leur ignorance du destin de leurs enfants, tissent pour eux des rêves d’avenir ; et Dieu sait dans quels nuages dorés vont parfois se perdre les rêves maternels. Marie, elle, sait le sort éternellement réservé à son Fils. Elle sait qu’elle le perdra à trente ans et dans des circonstances auxquelles on ne peut pas penser. La vision du sacrifice rédempteur est toujours au-dedans de ses paupières. Et ce n’est pas une éventualité, une menace, c’est une certitude.
La Vierge-Mère marche dans l’ivresse d’un bonheur idéalement pur avec un couteau planté dans le cœur. Ah ! notre psychologie est à court et n’a qu’à se taire devant la Mère de Jésus !
Mais rendons-lui grâce à jamais d’avoir librement accepté son destin. N’eût-il été fait que de douceur et de gloire, que les siècles ne la féliciteraient pas moins d’avoir été choisie et d’avoir accepté. Mais l’honneur de la maternité divine comportait une somme de souffrance et un martyre qui dépassaient la mesure commune. Elle le savait, et cela n’avait pas retardé son Fiat. Elle avait accepté de plein cœur sa part dans la Rédemption, souriant moins à l’honneur et à la gloire qu’à la volonté divine et aux souffrances maternelles que Dieu agréerait pour le salut du monde.
C’est la pensée du sonnet célèbre :
Tout te chante, ô Marie, et pourtant quelle femme,
Même au prix de ta gloire, eût bravé tes douleurs ?
Fr. Louis De Gonzague, O. M. C : Lectures sur la Vierge
Tiré de « La Semaine Religieuse du Diocèse de Quimper et de Léon » 53ième année, numéro 4, 28 janvier 1938.
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