Si François est un vrai Pape, vous voilà coincés avec !
De l’impossibilité de juger ou de déposer un vrai Pape
(Photographie : Hulton-Deutsch Collection/CORBIS)
Le Pape : il juge tout le monde et n’est jugé par personne
d’après Novus Ordo Watch
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Reconnaître la secte Conciliaire comme étant l’Église catholique ne va pas sans conséquences. Idem pour le fait de croire que Jorge Bergoglio est le Vicaire du Christ bien que ce soit un apostat public. Si Bergoglio est validement Pape, alors aucun pouvoir sur terre ne peut le priver de sa papauté. S’il est vraiment le successeur de Pierre, il peut démissionner volontairement, mais nul ne peut lui ôter son pontificat.
Cette vérité évidente met à mal la position du camp des “R&R” « Reconnaître-tout-en-résistant » (c’est-à-dire les « semi-traditionalistes »), maintenant que François se comporte de manière si évidemment non catholique, nuisant ainsi au catholicisme gravement et aux yeux de tous.
La situation devenant de plus en plus intenable au fil des jours, on entend tout et n’importe quoi : de ridicules pétitions exigeant que François devienne catholique ou démissionne, ou bien encore des appels ouverts à sa destitution par les « évêques » ou les « cardinaux ». Le nouveau livre anti-sédévacantiste True or False Pope? (vrai ou faux Pape ?) de John Salza et Robert Siscoe tente même de fournir une justification théologique pour déposer le Pape et prétend montrer comment cela peut se faire.
Oui, vous avez bien lu : Ceux-là même qui ne cessent de rabâcher qu’on ne peut « juger le Pape » lancent à présent des appels… pour que le « Pape » soit jugé. Tout se passe décidément de façon bizarre dans le Novus Ordo-Land : les sédévacantistes se font vivement réprimander pour « juger le Pape », conscients qu’ils sont que si les enseignements catholiques ont un sens, Jorge Bergoglio ne peut absolument pas être un Pape valide, tandis que ceux qui croient que François est bel et bien un Pape valide peuvent, sans le moindre état d’âme, non seulement le traiter comme l’idiot du village, le contredire, le tourner en dérision et le critiquer à volonté, mais aller jusqu’à exiger que d’autres membres de l’« Église » procèdent à sa destitution, le tout – bien entendu – sans « juger le Pape ». Bienvenue au Far West ! De toute évidence, il est grand temps que nous examinions ce que l’Église catholique enseigne sur la possibilité ou l’impossibilité de juger un Pape validement régnant ou de le « déposer ».
Que signifie « juger le Pape » ?
L’Église catholique enseigne de manière dogmatique que nul n’est autorisé ou apte à juger le Pape. Ainsi en a décidé le Concile du Vatican (1869-70) :
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Parce que le droit divin de la primauté apostolique place le Pontife romain au-dessus de toute l’Église, nous enseignons et déclarons encore qu’il est le juge suprême des fidèles et que, dans toutes les causes qui touchent à la juridiction ecclésiastique, on peut faire recours à son jugement. Le jugement du Siège Apostolique, auquel aucune autorité n’est supérieure, ne doit être remis en question par personne, et personne n’a le droit de juger ses décisions. C’est pourquoi ceux qui affirment qu’il est permis d’en appeler des jugements du Pontife romain au concile œcuménique comme à une autorité supérieure à ce Pontife, s’écartent du chemin de la vérité. »
(Concile du Vatican, Constitution dogmatique Pastor Aeternus, Ch. 3 ; Denz. 1830 ; c’est nous qui soulignons.)
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Comme nul ne peut juger le Pape, il est de la plus haute importance de savoir ce que constitue au juste le fait de juger le Pape. Disons-le sans ambages : « juger le Pape », cela ne signifie pas juger du point de savoir si quelqu’un est Pape, car il va de soi que cela équivaudrait à un raisonnement circulaire. Cela signifie placer son propre jugement au-dessus de celui du Pape (reconnu), soit en rejetant la sentence définitive rendue par le Vicaire du Christ sur toute question relevant de la Foi, de la morale ou de la discipline, soit en prétendant rendre ses enseignements, lois ou décisions disciplinaires sujettes à révision ou à validation par quelqu’un d’autre que lui. Le Pape étant la plus haute autorité de l’Église, nul ne peut mettre en question son jugement, faire appel de ce dernier ou l’annuler.
Mais, demandera-t-on, pourquoi nul ne peut juger le Pape ? La réponse est bien simple : au sens strictement canonique du terme, juger est l’apanage d’un supérieur, et le Pape, étant la plus haute autorité de l’Église, n’a aucun supérieur sur terre. C’est pourquoi nul ne peut citer le Pape à comparaître devant un tribunal pour y être soumis à un interrogatoire, et moins encore pour y faire l’objet d’un jugement. Nul n’étant au-dessus du Pape, personne ne peut le juger, pas même l’ensemble des évêques ou des cardinaux, par même l’Église militante tout entière. Et non, ce n’est pas là notre idée, c’est l’enseignement contraignant de l’Église, ainsi que nous allons le voir.
Avant de fournir diverses citations à l’appui de notre position sur la manière dont l’Église comprend son enseignement selon lequel un Pape ne peut être jugé, il nous faut souligner qu’elles ont toutes été délibérément choisies au cours de la période écoulée depuis 1870, c’est-à-dire depuis l’époque du Concile du Vatican, qui a énoncé un important corpus de doctrine catholique au sujet de la papauté et radicalement empêché de soutenir des théories que l’on pouvait encore professer jusqu’alors. Nous nous distinguons en cela des tenants du “R&R” « Reconnaître-tout-en-résistant », notamment MM. Salza et Siscoe, qui avancent en grande partie des idées abandonnées après le Concile Vatican (1870) parce qu’elles ne tenaient plus face aux enseignements de ce Concile — raison pour laquelle presque tous les textes qu’ils invoquent à titre de preuves sont dus à des théologiens et canonistes ayant écrit avant le Concile du Vatican : le Cardinal Thomas Cajetan, le Père Francisco Suarez, Jean de Saint-Thomas, le Père Paul Laymann et d’autres. Or, si ces théories étaient encore valables après Vatican I, comment se fait-il que Salza et Siscoe ne citent jamais aucun théologien ou canoniste du vingtième siècle à leur sujet ?
Le premier concile œcuménique du Vatican, convoqué par Pie IX.
Nous y reviendrons par la suite. Pour l’instant, examinons ce que l’Église enseigne concernant le fait de « juger le Pape ». Tout d’abord, voyons un peu le principe effectivement énoncé dans le Code de Droit Canonique de 1917 : « Prima Sedes a nemine indicatur » (Canon 1556) — « Le premier Siège n’est jugé par personne ». Telle est la version canonique de l’enseignement de Vatican I sur la non-permissibilité de juger le Pape. Qu’est-ce que cela signifie au juste ? Pour bien comprendre ce principe, regardons simplement ce que disent de lui divers commentaires et études catholiques sur le Code de Droit Canonique.
Commençons par le Père Charles Augustine (un Bénédictin, Charles Augustine Bachofen, photo ci-dessus) et par son ouvrage publié en 1921 sous le titre Commentary on the New Code of Canon Law :
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Le Premier Siège ou Siège Primatial n’est sujet au jugement de personne. Cette proposition est à prendre dans son sens intégral, et non pas seulement eu égard à l’objet de l’infaillibilité. Car sur les points de foi et de morale, la coutume a toujours été de recevoir la sentence définitive du Saint Siège, dont nul n’ose contester le jugement, ainsi que le démontre la tradition des Pères. En outre, il n’a jamais été permis de reconsidérer des questions ou controverses sur lesquelles le Saint Siège a déjà statué. Cependant, la personne du Pontife Suprême elle-même n’a jamais été considérée comme susceptible d’un jugement humain, l’intéressé étant responsable devant Dieu seul, même s’il est accusé de méfaits et de crimes à titre personnel. Le Pape Symmaque (498-514) offre de cela un exemple frappant. Il déféra à la convocation d’un concile (le Synodus Palmaris, en 502) parce qu’il jugeait de son devoir de veiller à ce que rien ne vînt entacher sa réputation, mais ce synode représente une splendide justification de notre canon. Il a en effet adopté l’Apologie d’Ennode de Pavie, dans laquelle on relève la phrase significative que voici : « Dieu a voulu que les causes des hommes fussent jugées par d’autres hommes, mais Il a sans conteste réservé à Son propre tribunal le chef de ce siège. » Aucun autre argument en faveur de la théorie traditionnelle ne s’impose donc. Un concile général ne peut juger le Pape, parce qu’à moins d’être convoqué et ratifié par lui, il ne pourrait rendre une sentence valide. Il ne reste donc plus que la possibilité d’un recours à Dieu, qui prendra soin de Son Église et de sa tête. »
(Révérend Père Charles Augustine, A Commentary on the New Code of Canon Law, Vol. VII [St. Louis, MO : Herder, 1921], pp. 11-12 ; italiques dans le texte ; c’est nous qui soulignons.)
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Passons maintenant au commentaire bien connu de Woywod et Smith, qui ont ceci à dire sur le Canon 1556 :
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Le Siège Primatial ne peut être jugé par personne (Canon 1556). Le Pontife Suprême détient le pouvoir législatif, administratif et judiciaire le plus élevé au sein de l’Église. Le Code souligne que le Pontife romain ne peut être mis en jugement par personne. Le principe même d’un jugement suppose que le tribunal chargé du procès ait compétence pour juger l’intéressé ; or, le Pape n’ayant aucun supérieur, aucun tribunal n’a le pouvoir de le soumettre à un procès judiciaire. »
(Révérend Père Stanislaus Woywod, A Practical Commentary on the Code of Canon Law, révisé par le Révérend Père Callistus Smith [New York : Joseph F. Wagner, 1952], n. 1549, p. 225 ; c’est nous qui soulignons.)
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Voyons à présent l’explication du Père Sylvester Berry selon laquelle le Canon 1556 ne traite pas d’une simple question disciplinaire sujette à modification, mais exprime effectivement le principe enraciné dans l’immuable loi divine :
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Le Pontife Romain n’est soumis à aucun pouvoir sur terre, que ce dernier soit civil ou ecclésiastique. Cela découle nécessairement de sa position de chef suprême de l’Église, qui n’est soumis à aucune autorité autre que celle du Christ, et exclusivement elle. “Étant le chef suprême de l’Église, il ne peut être jugé par aucune autre autorité ecclésiastique, et comme l’Église est une société spirituelle supérieure à toute autre autorité temporelle, quelle qu’elle soit, il ne peut être jugé par aucun dirigeant temporel. Par conséquent, le chef suprême de l’Église peut diriger et juger les dirigeants des autorités temporelles, mais il ne peut être ni dirigé, ni jugé par eux sans qu’il y ait inversion du bon ordre ayant ses fondations dans la nature même des choses.” [Saint Robert Bellarmin, De Romano Pontifice (1), Livre 2, Ch. 26]. Cette doctrine est enseignée par les Pères et incorporée dans les canons de l’Église : “Le premier Siège n’est jugé par personne” [Canon 1556]. Un synode d’évêques réuni à Rome en 503 pour enquêter sur les accusations portées contre le Pape Symmaque a déclaré : “Dieu a voulu que les causes des hommes fussent jugées par d’autres hommes, mais Il a sans conteste réservé à Son propre tribunal le chef de ce siège.” Cette complète immunité dont jouit le Pontife Romain vis-à-vis de toute instance civile est d’institution divine, car c’est le Christ Lui-même qui l’a conférée à Pierre et à ses successeurs, au moins implicitement, lorsqu’Il les a chargés de l’autorité suprême, laquelle implique nécessairement une telle immunité. »
(Révérend Père Sylvester Berry, The Church of Christ : An Apologetic and Dogmatic Treatise – Londres : Herder, 1927], pp. 544-545 ; c’est nous qui soulignons.)
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Comme le signale le Père Berry, la doctrine selon laquelle le Saint Siège n’est soumis au jugement de personne était déjà professée par saint Robert Bellarmin (1542-1621), dont l’enseignement sur la papauté a été adopté pour l’essentiel – et parfois même textuellement – par le Concile du Vatican. Il est bon de le rappeler à la face de nos opposants, qui aiment tant s’en remettre aux contradicteurs de Bellarmin sur diverses questions relatives à la papauté : Cajetan, Suarez et Jean de Saint-Thomas, qu’ils citent abondamment. C’est pourtant l’enseignement de Bellarmin, et non pas celui des autres, qu’adopta le Concile, et c’est pourtant Bellarmin qui fut canonisé et déclaré Docteur de l’Église, non pas Cajetan, Suarez et Jean de Saint-Thomas. (Il existe certes un saint Cajetan, mais ce n’est pas le cardinal Tommaso de Vio Gaetani, dit Cajetan, dominicain (1469-1534).)
Dans une dissertation sur le Droit Canonique publiée en 1922, le Père Thomas Burke fournit un résumé succinct de la question, assorti de quelques utiles informations complémentaires :
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Le Pontife romain a reçu du Christ l’autorité suprême sur l’Église tout entière, et ce fait très important signifie que pour diriger les fidèles dans le sens du salut éternel, l’intéressé possède une entière compétence et tous les attributs accompagnant celle-ci. Seul ou avec un Concile convoqué par ses soins, il peut établir des lois pour l’Église universelle, les abroger ou y déroger, accorder des privilèges, nommer, déposer, juger ou bannir des évêques. Il est le juge suprême par qui toutes les affaires doivent être jugées ; il est le juge suprême que nul ne peut juger.
« … Il ne sied point que le législateur suprême [le Pape] soit soumis à d’autres lois, sauf celles émanant du Souverain Pontificat ; il ne sied point qu’il soit jugé par ses inférieurs, lui qui représente l’instance de recours ayant compétence pour juger tous les hommes, dirigeants comme simples sujets…
« La loi divine sur laquelle l’immunité pontificale repose en matière spirituelle sert aussi de socle à l’élaboration du droit ecclésiastique pour ce qui est des choses en partie spirituelles et en partie temporelles. Que le Siège Apostolique ne soit sujet à aucun jugement, c’est ce que saint Boniface a affirmé en ces termes : “La supériorité de l’Église et du pouvoir ecclésiastique sur l’État et le pouvoir civil est vérifiée par la prophétie suivante de Jérémie : ‘Vois, je t’établis en ce jour sur les nations et sur les royaumes, pour arracher et pour abattre, et pour perdre et pour détruire, et pour planter et pour bâtir’ [Jér. 1: 10]. Si donc le pouvoir terrestre dévie, il sera jugé par le pouvoir spirituel ; et si un pouvoir spirituel inférieur dévie, il le sera par celui qui lui est supérieur ; mais si le pouvoir suprême dévie, c’est par Dieu seul et non par l’homme qu’il pourra être jugé, comme l’atteste l’Apôtre : L’homme spirituel juge de tout, et n’est lui-même jugé par personne.” [1Co 2,15 – Bulle Unam Sanctam]
[…]
Le Pontife romain est déclaré ne relever d’aucune instance ou d’aucun tribunal par le premier Canon dans De Fore Competente “Prima Sedes a nemine judicatur” [Canon 1556]. Par Prima Sedes, on entend le Pontife romain, ainsi que le fait apparaître la nature de la question [cf. Canon 7]. La Sacrée Congrégation ainsi que les Tribunaux et Offices de Curie par le biais desquels le Pape tend à régler les affaires de l’Église ne sont pas couverts par cette immunité, et leurs membres peuvent être jugés par le Pape lui-même ou son délégué. La raison pour laquelle le Pape ne peut être jugé par personne est évidente. Nul ne peut être jugé par quelqu’un s’il n’est subordonné à celui-ci, du moins en ce qui concerne la matière du procès. Or, le Pontife romain est le Vicaire de Jésus-Christ, qui est le Roi des rois et le Seigneur des seigneurs, et c’est à lui qu’a été confiée la mission de paître Ses agneaux et Ses brebis. En aucun cas, par conséquent, il ne peut être subordonné à quiconque ou à quelque instance que ce soit, et il est entièrement à l’abri de tout jugement humain. Ce principe n’admet aucune exception d’ordre juridique ou dogmatique. »
(Père Thomas Joseph Burke, Competence in Ecclesiastical Tribunals [Washington, D.C. : Catholic University of America Press, 1922], pp. 85-87 ; c’est nous qui soulignons.)
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Voilà l’enseignement catholique. Étant d’une logique extrême, il n’est pas difficile à comprendre ou à accepter. En somme, la maxime « nul ne peut juger le Pape » signifie que le Pape n’a pas de supérieur et, par conséquent, que ses enseignements, jugements et décisions sont définitifs et non sujets à révision ou à validation par quiconque. Dans la mesure où telle de ses sentences ou décisions serait en soi modifiable, elle ne pourrait être modifiée que par un successeur qui, bien que n’étant pas supérieur à lui, serait néanmoins son égal. (Ainsi, par exemple, on relève dans l’histoire de l’Église que la suppression de l’ordre des Jésuites ordonnée par le Pape Clément XIV en 1773 a été rapportée par le Pape Pie VII en 1814.)
Jésus remettant à saint Pierre les clés du Paradis
de Jean-Auguste-Dominique Ingres – 1820
Seul le Christ peut juger le Pape !
Maintenant que nous savons avec précision ce que la maxime en question signifie effectivement, il est nécessaire de voir aussi ce que « juger le Pape » ne veut pas dire. On notera que rien dans les références citées ci-dessus ne parle de juger du point de savoir si un prétendant au titre de Souverain Pontife est bel et bien Pape ; car le principe considéré est que nul ne peut juger le Pape, et non pas que nul ne peut juger SI quelqu’un est Pape. Dans le premier cas, il est question du dogme de la papauté, et dans le second de tel individu habilité ou non à être titulaire de la papauté. Le principe qui exempte le Pape de tout jugement ne s’applique donc qu’à tous les titulaires valides de l’office papal et n’a pas la moindre incidence sur ce qui est une question entièrement différente : savoir comment vérifier SI la prétention d’un certain individu à ÊTRE le Pape est justifiée ou non. Cette question-ci est naturellement de la plus haute importance, en particulier pour ce qui concerne la nature et la fonction de la papauté, mais nous réservons son examen approfondi à un futur article de notre blogue.
Au cours des années quatre-vingts, l’apologiste lefebvriste Michael Davies (1936-2004), l’un des hérauts les plus influents de la tendance “R&R” « Reconnaître-tout-en-résistant », a déclaré haut et fort qu’il n’était pas permis de soutenir que Jean-Paul II (qui régnait alors au Vatican) ne fût pas un Pape valide, parce que cela serait revenu à « juger le Pape », chose rigoureusement interdite à un catholique. Dans une critique sévère et exhaustive de Davies, l’auteur sédévacantiste John Daly expose en ces termes l’absurdité d’une telle position :
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La position de Davies équivaut en réalité à dire qu’il n’existe aucune distinction entre le fait de juger si un individu est le Pape et celui de juger le Pape ; Or, en nous interdisant de juger si un individu est ou non le Pape, Davies nous impose en fait d’admettre sans la moindre critique que n’importe qui est fondé à se prétendre pape. Après tout, si la prétention de Jean-Paul II ne peut être mise en doute, pourquoi serait-on autorisé à mettre en doute la même prétention de la part de quelqu’un d’autre, tel le sieur Clemente Domínguez Gómez, d’El Palma de Troya (2), qui, depuis 1978, se présente comme le « Pape Grégoire XVII » ? Si l’on « juge le Pape » en examinant les lettres de créance de Karol Wojtyla, on doit « juger le Pape » en examinant celles de Domínguez. Mais il va de soi qu’en réalité, on ne fait rien de tel dans l’un et l’autre cas. L’argument de Davies est un raisonnement circulaire de la pire espèce, puisqu’il s’appuie sur la légitimité de Jean-Paul II – cela même que nous contestons – pour nous interdire de la mettre en doute. »
(John S. Daly, Michael Davies – An Evaluation, 2ème éd. [Saint-Sauveur de Meilhan : Tradibooks, 2015], pp. 141-142 ; italiques dans le texte.)
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Il est clair, par conséquent, que l’enseignement ayant force de loi selon lequel nul ne peut juger le Pape n’a rien à voir avec le fait de déterminer si tel prétendant est effectivement Pape ; en revanche, il a tout à voir avec le fait que le Pape est la plus haute autorité de l’Église et que pour cette raison, nul ne peut mettre en doute sa décision, en faire appel ou l’annuler. C’est cela que veut dire l’Église lorsqu’elle enseigne que nul ne peut juger le Pape.
Nous en arrivons donc à la conclusion ironique que voici : nos opposants de variété “R&R” « Reconnaître-tout-en-résistant » nous accusent à tort de « juger le Pape » lorsque nous disons que Jorge Bergoglio n’est pas le Pape ; en revanche, étant donné ce que veut vraiment dire « juger le Pape », il va de soi que ce sont justement eux qui jugent leur pape putatif, puisqu’ils ne cessent de rejeter, de mettre en cause ou de prétendre annuler ses enseignements, ses lois, ses sentences et ses décisions. La Fraternité Saint-Pie X offre un parfait exemple de cette attitude, car elle gère pour l’essentiel une église parallèle dotée de ses instances bidon d’annulation de mariages et professe un quasi-magistère entaché de fausseté, non sans soumettre constamment le « Saint Siège » à son jugement, renversant ainsi la situation. Pour trouver des exemples plus précis de cela, se reporter à notre article : « Le Pape parle – C’est vous qui décidez ? »
Toujours pas convaincu ? Alors, jetez plutôt un coup d’œil aux citations pontificales ci-après, et voyez si vous n’y trouvez pas la condamnation de ces choses mêmes que la FSSPX et autres adeptes du “R&R” « Reconnaître-tout-en-résistant » font ou préconisent habituellement :
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Comme cela ne plaît pas aux néo-schismatiques, ils suivent l’exemple des hérétiques d’époques plus récentes : ils prétendent que la sentence de schisme et d’excommunication prononcée contre eux par l’Archevêque de Tyane, Délégué apostolique de Constantinople, fut injuste et, par conséquent, dénuée de portée et d’influence. Ils ont soutenu aussi qu’ils ne pouvaient accepter la sentence parce que les fidèles risqueraient de déserter au profit des hérétiques s’ils étaient privés de leurs ministres. Ces arguments inédits étaient entièrement inconnus et inouïs des anciens Pères de l’Église. “Partout dans le monde, l’Église sait que le Siège du bienheureux Apôtre Pierre a le droit de délier ce que les Souverains Pontifes ont lié, car ce Siège possède le droit de juger toute l’Église, et nul ne peut juger son jugement.” [Saint Gélase, épître 26, sect. 5.] Les hérétiques jansénistes ont osé enseigner des doctrines selon lesquelles l’excommunication prononcée par un prélat légitime pouvait être ignorée sous prétexte d’injustice. Toute personne, disaient-ils, doit accomplir son devoir en dépit d’une excommunication. Notre prédécesseur d’heureuse mémoire Clément XI, dans sa constitution Unigenitus contre les erreurs de Quesnell, a interdit et condamné les déclarations de cette nature [voir Denz. 1441-43].
« Cela ne différait guère de certaines des déclarations faites par John Wyclif et précédemment condamnées par le Concile de Constance et le Pape Martin V. La faiblesse humaine peut expliquer que quelqu’un soit injustement frappé de censure par le prélat dont il dépend. Mais il n’en reste pas moins nécessaire, comme nous en a avertis Notre prédécesseur saint Grégoire le Grand “… que la sentence par laquelle le pasteur lie soit juste ou injuste, elle doit être respectée par les fidèles, de peur que celui qui la subit, bien qu’il ait peut-être été lié injustement, n’en vienne à mériter par une autre faute cette sentence qui le lie.” [Homélie 26 sur les Évangiles, sect. 6] Or, si l’on doit redouter une condamnation même injuste émise par son évêque, que dire de ces hommes qui ont été condamnés pour s’être rebellés contre leur évêque et ce Siège Apostolique et pour avoir mis en pièces, comme ils le font à présent par un nouveau schisme, la tunique inconsutile du Christ, qui est l’Église ? »
(Pape Pie IX, Encyclique Quartus Supra, n. 10)
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C’est également une preuve de soumission peu sincère que d’établir une opposition entre Souverain Pontife et Souverain Pontife. Ceux qui, entre deux directions différentes, repoussent celle du présent pour s’en tenir au passé ne font pas preuve d’obéissance envers l’autorité, qui a le droit et le devoir de les diriger, et ressemblent sous quelques rapports à ceux qui, après une condamnation, voudraient en appeler au futur Concile ou à un Pape mieux informé. »
(Pape Léon XIII, Lettre apostolique Epistola Tua)
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Ce n’est pas un moindre titre d’honneur pour vous que de tendre, en matière de discipline ecclésiastique, à la parfaite obéissance d’exécution, de volonté et de jugement envers le Siège apostolique, qui contribue tellement « à […] une plus sûre direction de l’Esprit Saint. » [Saint Irénée, Adv. Haer., L. III, c. 3]
[…]
« Ce titre d’honneur mérité par la rectitude de la doctrine et la fidélité dans l’obéissance due au Vicaire du Christ, que personne ne vous l’ôte ; et qu’il n’y ait pas place parmi vous pour un certain orgueil de libre examen, propre à une mentalité hétérodoxe plutôt que catholique, et par suite duquel on n’hésite pas à évoquer à la barre de son jugement personnel même ce qui émane du Siège apostolique. »
(Pape Pie XII, Discours aux Pères de la Compagnie de Jésus, 10 septembre 1957.)
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Ces trois citations représentent une parfaite condamnation de la position maintenue par la Fraternité Saint-Pie X et ses partisans, et elles réitèrent le point de vue catholique selon lequel le Pape ne peut être jugé par personne sur terre, parce qu’il n’a aucun supérieur humain et qu’un jugement légalement contraignant ne peut être rendu que par un supérieur.
Voici pourquoi nous appelons « semi-traditionnalistes » ou « néo-traditionnalistes » les tenants de la position “R&R” « Reconnaître-tout-en-résistant » : ils n’adhèrent à la Tradition qu’en partie, dans une certaine mesure ; la compréhension qu’ils ont d’elle est tout à fait inédite et n’a donc rien de traditionnel.
Ayant ainsi clarifié ce que veut dire « juger le Pape », nous pouvons passer maintenant à la deuxième question qui se présente : un Pape authentique peut-il être déposé ?
Un Pape authentique peut-il être déposé ?
Si nul ne peut juger le Pape, puisque seul un supérieur pourrait le faire et que le Pape n’en a aucun sur terre, il s’ensuit nécessairement qu’a fortiori, il ne peut être relevé de ses fonctions, ou déposé, car un tel acte représenterait bien davantage que le simple fait de juger l’intéressé.
La question de la déposition est assez épineuse, car dans l’histoire de l’Église, notamment au cours des premiers siècles, le mot « déposition » n’avait pas toujours la signification bien définie qu’il a aujourd’hui (voir le Père H. A. Ayrinhac, Penal Legislation in the New Code of Canon Law [New York : Benziger, 1920], p. 145). Toutefois, la définition du terme est arrêtée, au moins dans le Code de Droit canonique de 1917, ainsi que le souligne le Père Ayrinhac dans son commentaire sur le Canon 2303 :
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Par la déposition, un ecclésiastique est définitivement privé de tout office, traitement, dignité, pension et fonction au sein de l’Église et devient incapable de les récupérer à l’avenir ; mais il n’est pas privé des privilèges cléricaux ni réduit à l’état laïc, et il reste tenu de se conformer aux obligations imposées par son ordination, à savoir celles du célibat et de l’Office divin.
« La déposition représente davantage que la suspension ou la privation d’office, mais moins que la dégradation. Elle ôte à l’intéressé l’office ou le traitement, comme le fait la privation, et non pas simplement le droit d’exercer certains pouvoirs, comme le fait la suspension ; elle crée en outre une inaptitude à être promu ultérieurement, mais contrairement à la dégradation, elle ne prive pas l’intéressé de ses privilèges cléricaux (Wenz. N. 120). »
(Henry Amans Ayrinhac, Penal Legislation, n. 168, p. 163)
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On voit donc que la déposition n’est en aucun cas synonyme du retrait d’office. En fait, bien qu’elle inclue ce dernier (« elle retire l’office »), elle représente beaucoup plus que cela (voir aussi le Canon 2288). Il importe de s’en souvenir quand on lit les sources canoniques ou théologiques traitant de la déposition.
Une autre distinction importante, qu’il faut garder présente à l’esprit, est qu’une privation d’office – à savoir le retrait d’un office – est essentiellement différente de la perte automatique d’office qui se produit ipso facto et sans la nécessité d’une déclaration lorsqu’un ecclésiastique apostasie publiquement de la foi catholique (voir Canon 188 n. 4). Le Code de Droit Canonique appelle du reste cette perte d’office « renonciation tacite », et non pas privation, retrait ou déposition :
« En vertu de la renonciation tacite admise ipso jure, sont vacants “ipso facto” et sans aucune déclaration, quelque office que ce soit si le clerc :
[…]
4° Apostasie publiquement la foi catholique. »
Un examen approfondi du Canon 188 n. 4 dépasserait la portée du présent article. Il sera donc gardé pour plus tard, mais si nous mentionnons ce canon ici, c’est pour souligner le fait suivant : on aurait tort de penser que parce que la déposition et le retrait d’office sont impossibles dans le cas d’un Pape, il serait donc impossible aussi pour un Pape authentique de perdre automatiquement son office par renonciation tacite pour avoir apostasié publiquement de la foi catholique. Ce sont là, en effet, deux choses tout à fait différentes, et bien que nous n’admettions pas qu’il soit possible à un Pape authentique de jamais apostasier publiquement de la Foi, nous n’en soulignons pas moins, avec Vatican I, saint Robert Bellarmin et le Code de Droit Canonique, que si un Pape pouvait faire une telle chose, il cesserait immédiatement d’être Pape.
Une excellente étude antérieure au conciliabule Vatican d’Eux sur la renonciation tacite se trouve dans l’œuvre du Père Gerald McDevitt intitulée The Renunciation of an Ecclesiastical Office (1945), actuellement rééditée. Nous ne saurions nous étonner que dans les plus de sept cents pages de leur livre True or False Pope? (Vrai ou faux Pape ?), Salza et Siscoe aient réussi à ne pas mentionner une seule fois l’ouvrage en question. Au lieu de cela, ils consacrent toute leur encre à exposer les positions de Cajetan, Suarez et Jean de Saint-Thomas ; or, ceux-ci écrivaient bien plus de deux cents ans avant le Premier Concile du Vatican, dont les enseignements ont rendu intenables leurs théories relatives à la déposition d’un pape, ainsi que nous l’avons dit.
Elle n’est pas nouvelle, cette tactique consistant à invoquer à l’appui d’une position théologique personnelle des textes et arguments d’un autre âge, révoqués ensuite par un jugement définitif de l’Église. À l’époque du Concile Vatican, par exemple, un évêque français, Mgr Henri Maret, y a recouru pour tenter de justifier certaines doctrines gallicanes contre la position théologique du parti dit ultramontiste, dont le Concile devait ensuite confirmer l’orthodoxie. Maret, qui avait publié un ouvrage en deux volumes sous le pseudonyme « Évêque de Sura », s’attira la réplique du célèbre Dom Prosper Guéranger, Abbé de Solesmes (France). La réplique de Dom Guéranger à toutes les erreurs de Maret parut sous le titre De la Monarchie Pontificale et reçut l’approbation explicite du Pape Pie IX.
Voici ce que Dom Guéranger avait à dire au sujet de la tactique de Maret :
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Celui-là donc qui veut avoir la doctrine de l’Église clairement définie sur les droits de la papauté, n’a qu’à étudier les décisions de ces deux Conciles œcuméniques, et dans cette occasion comme en toute autre du même genre, interpréter les actes et les écrits des temps antérieurs d’après les jugements définitoires, et non ceux-ci d’après les écrits et les actes qui les ont précédés.
« Or, c’est le contraire qu’a fait Mgr l’évêque de Sura. À la suite de Bossuet dans la Défense de la Déclaration, il est allé demander les preuves de son système aux temps qui ont précédé ces deux Conciles, cherchant à donner une portée qu’ils ne pourraient avoir à des faits antérieurs de beaucoup de siècles aux décisions en question. […]
« … Mgr de Sura voudrait nous prouver que le gallicanisme est présent partout dans l’antiquité. Le prélat ne cite pas un fait conciliaire auquel il n’ait été répondu, et il s’abstient d’en relever cent autres qui sont expressément dans le sens des décrets de Lyon et de Florence. […]
« La réunion des faits amassés par Mgr de Sura, et montrés par lui dans un jour qui est loin d’être le véritable, pourra faire illusion à ceux de ses lecteurs qui sont étrangers à la science ecclésiastique ; les autres ne s’en étonneront pas. Il savant que sur la plupart des thèses condamnées par l’Église à Trente et depuis, les fauteurs de la doctrine prescrite ont toujours été à même de rassembler un assez fort bagage de textes et de faits antérieurs au jugement définitif, et qu’ils n’y ont pas manqué. […]
« Il a procédé à l’inverse de la vraie méthode théologique, en cherchant à infirmer les décisions formelles par des faits qui les auraient précédées, au lieu d’expliquer ces faits à l’aide des décisions elles-mêmes. »
(Dom Prosper Guéranger, De la Monarchie Pontificale, en ligne ICI ; en PDF ICI)
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Tout cela est étrangement analogue à ce que Salza et Siscoe veulent faire dans « True or False Pope? », à savoir exciper de théories théologiques avancées à une époque où elles étaient encore acceptables, ou du moins tolérées, et prétendre qu’elles sont toujours tenables aujourd’hui, bien que depuis le Concile de Vatican et la promulgation du Code de Droit Canonique de 1917, elles ne puissent plus être maintenues, ce pourquoi Salza & Siscoe sont bien en peine, justement, de citer le moindre théologien du vingtième siècle qui soit d’accord avec elles.
On les voit recourir au même procédé sur leur site, où ils ont posté un article pompeusement intitulé « Un canoniste en renom du dix-septième siècle réfute le sédévacantisme ». Demandez-vous pourquoi ils sont remontés jusqu’au dix-septième siècle pour y chercher un soutien à leur position : parce qu’à l’époque, il était encore permis de soutenir la thèse avancée par le canoniste en question (le Père Paul Laymann), alors que depuis le Concile du Vatican de 1870 et l’adoption du Code de Droit Canonique de 1917, la chose n’est plus possible.
Vous ne le croyez pas ? Vérifiez donc par vous-même en vous référant au Cardinal Louis Billot, S.J. (1846-1931). Dans son Tractatus De Ecclesia Christi (Traité de l’Église du Christ), le grand théologien jésuite traite de la question de savoir si un Pape peut être déposé, et il le fait à la lumière non seulement des enseignements de saint Robert Bellarmin, écrits au douzième siècle, mais aussi à celle des décrets du Premier Concile du Vatican et du Code de Droit Canonique.
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Mais dans la mesure où c’est certain, on doit également tenir pour incontestable que quelqu’un qui a été élevé une fois pour toutes au pontificat peut s’en libérer en abdiquant librement, de même que si un Souverain Pontife est douteux, [son retrait] ne peut absolument se faire au moyen d’une déposition en vertu de laquelle il serait privé de son autorité par l’Église ou un groupe quelconque existant dans l’Église. La raison générale en est qu’un supérieur n’est pas déposé par un inférieur. Cependant, le Pape est au-dessus de tout homme au sein de l’Église, à titre tant individuel que collectif, et non pas seulement en règle générale, mais aussi eu égard à n’importe quel cas ou événement, tel que cela ressort à l’évidence des préceptes de la monarchie ecclésiastique et que c’est ouvertement explicité ci-dessous, où [j’examine] le pouvoir et le principe directeur de la primauté. D’où il ressort que l’avis des Gallicans en la matière est à considérer de la même façon que leur opinion relative à la supériorité d’un Concile sur le Pape, laquelle s’est avérée hérétique après les définitions données par le Concile du Vatican.
« On ne peut pas dire non plus que la déposition soit encore concevable, notamment par le retrait direct du pouvoir pontifical à l’intéressé (car ledit pouvoir provient immédiatement de Dieu et a sous lui tout autre pouvoir au sein de l’Église), mais la légitimité produite par l’élection serait naturellement – et sans autre condition – retirée à la personne du Souverain Pontife par un simple changement de sujet. En fait, il y a là une contradiction reconnue comme telle sur divers points. Premièrement, parce qu’en matière de responsabilité légale, le Souverain Pontife relèverait toujours du jugement d’inférieurs, ce qui constitue une parfaite contradiction. Deuxièmement, parce que ledit changement de sujet ne s’oppose pas corrélativement à l’élection, mais existe dans un autre ordre, assurément dans l’ordre d’un acte juridictionnel et juridiquement capable, et il ne s’ensuit donc pas [que] si la personne du Souverain Pontife peut être nommée par des hommes, l’intéressé puisse, par conséquent, être privé de sa légitimité par des hommes. Troisièmement, parce que l’Église ou la communauté ecclésiale n’a le privilège d’aucun acte vis-à-vis de la personne du Souverain Pontife, hormis l’élection de celui-ci. Donc, une élection canonique étant acquise, il ne reste rien d’autre à faire jusqu’à ce que se présente l’occasion d’une nouvelle élection, laquelle ne peut survenir qu’à la suite d’une vacance du siège. Par conséquent, l’impossibilité de toute déposition est certaine à n’importe quel égard. Nous parlerons cependant ci-après de ce qu’il faut penser des quatrième et cinquième sessions du Concile de Constance. »
(Cardinal Louis Billot, Tractatus de Ecclesia Christi, 5ème éd. [Rome : Université Pontificale Grégorienne, 1927], Question XIV, Thèse XXIX, pp. 628-629 ; c’est nous qui soulignons.)
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Ayant ainsi mis en pièces l’idée selon laquelle un Pape peut être déposé, Billot s’attaque ensuite à la question de la défection de l’Église, c’est-à-dire au point de savoir ce qui se passerait si un Pape devenait hérétique, schismatique ou apostat (on notera ici un parallélisme avec notre étude précédente, dans laquelle nous distinguions entre le retrait d’office qui intervient en cas de déposition et la renonciation tacite qui se produit concomitamment avec l’apostasie publique). Il n’est pas surprenant que Billot se range à nouveau de notre côté, celui du sédévacantisme :
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Si, en cas d’hérésie, un pape demeurant pape peut être déposé par l’Église, il en résulte nécessairement l’une ou l’autre de ces deux situations : ou bien la déposition ne prouve pas la supériorité de celui qui dépose par rapport à celui qui est déposé ; ou bien un pape demeurant pape a en réalité un supérieur sur terre, du moins eu égard à tel ou tel événement. De plus, une fois ouverte la voie de la déposition, du fait soit de la nature même de la chose, soit du droit positif, Il n’existe plus la moindre raison pour laquelle la possibilité d’une déposition devrait se restreindre au seul cas d’hérésie. Car dès lors s’effacent tous les principes auxquels est généralement liée l’incompatibilité de la chose, et il ne reste plus rien qu’une règle volontariste sur laquelle vient se greffer une exception arbitraire. »
(Billot, de Ecclesia, p. 630)
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Billot réfute en cela la position erronée que le Cardinal Cajetan et d’autres personnalités ont adoptée avant le Premier Concile du Vatican, position que promeuvent largement, désormais, Salza et Siscoe, ainsi que d’autres traditionalistes de la FSSPX ou d’ailleurs, adeptes de ce type de résistance. Nous pourrions fournir beaucoup d’autres citations de la Thèse de Billot, mais nous ne le ferons pas ici, car ce serait beaucoup trop long ; nous vous invitons plutôt à parcourir vous-mêmes cette Thèse, car elle mérite d’être lue en entier et dans un contexte approprié (3).
Dans cette Thèse, le Cardinal Billot énonce brièvement aussi l’idée selon laquelle l’adhésion pacifique de l’Église tout entière à tel prétendant au trône de Pierre constitue un signe infaillible que l’individu en question est en fait un Pape légitime. Salza & Siscoe ont fait de cette idée un de leurs principaux arguments contre le sédévacantisme, et nous ne la mentionnons ici que par honnêteté, de crainte qu’on nous accuse de « cacher » ce que Billot a dit à ce sujet. Nous traiterons in extenso la question de l’adhésion pacifique universelle dans un article ou un « post » ultérieur, mais nous ferons ici l’impasse sur elle, parce que l’acceptation pacifique n’a rien à voir avec l’impossibilité de juger ou de déposer un Pape.
Dans leur ouvrage « True or False Pope? », les deux auteurs anti-sédévacantistes consacrent un chapitre entier à soutenir, quoique avec d’innombrables nuances, qu’un Pape peut être déposé (pp. 331-368). Malheureusement, ce chapitre ne contient pas la moindre allusion à la Thèse XXIX du Cardinal Billot. Dans tout leur livre, en fait, Salza & Siscoe citent le Cardinal Billot principalement sur la question de l’adhésion pacifique universelle, mais pour ce qui est de savoir si un Pape peut être déposé, ils ne citent pratiquement pas cet auteur, et quand ils le font, ils trahissent sa pensée (voir, par exemple, page 151).
En tout état de cause, ce qui précède suffit à réfuter l’idée selon laquelle un Pape peut être déposé ou retiré de son office. Il est cependant un argument de Salze et Siscoe qui mérite que l’on s’y arrête, à savoir que quoique la faculté de juger appartienne de plein droit à un supérieur, même un inférieur peut juger son supérieur en cas d’hérésie. Salza & Siscoe prétendent que telle est la position de saint Robert Bellarmin, qu’ils présentent comme une « dérogation » au principe suivant lequel le Premier Siège ne peut être jugé par personne (pp. 300-303). Voici le passage sur lequel ils fondent leur affirmation :
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Tout d’abord, parce que le fait qu’un Pape hérétique peut être jugé est expressément consigné dans le Canon Si Papa, dist. 40, et avec [le Pape] Innocent [III]. Et qui plus est, dans le Quatrième Concile de Constantinople, Act 7, on trouve exposés les actes du Concile romain tenu sous [le Pape] Adrien, dans lesquels il apparaît que le Pape Honorius fut légalement frappé d’anathème parce qu’il avait été convaincu d’hérésie, unique motif pour lequel des inférieurs peuvent juger licitement des supérieurs. Il convient ici d’observer que bien qu’Honorius n’eût sans doute pas été un hérétique et que le Pape Adrien II eût été trompé par des copies altérées du Sixième Concile, qui présentaient faussement Honorius comme un hérétique, on ne peut quand même nier qu’Adrien, avec le Concile romain et l’ensemble du Huitième Synode, eut le sentiment qu’un Pontife romain pouvait être jugé en cas d’hérésie. Ajoutons que l’Église se trouverait dans l’état le plus misérable si elle était contrainte de reconnaître un pasteur dans un loup manifestement en train de rôder. »
(Saint Robert Bellarmin, De Romano Pontifice, Livre II, ch. 30 [Mediatrix Press, 2015], pp. 304-310 ; c’est nous qui soulignons.)
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À première vue, il peut en effet sembler que saint Robert Bellarmin aille à l’encontre de ce que le Concile du Vatican de 1870 devait définir ensuite, à savoir que nul ne peut juger le Premier Siège. Mais comme nous l’avons dit précédemment, « Pris sous l’angle juridique comme sous l’angle dogmatique, ce principe ne souffre aucune exception » (Burke, Competence in Ecclesiastical Tribunals, p. 87). Alors, qu’en est-il au juste ? Pour le savoir, on peut se tourner en toute confiance vers le Cardinal Billot, qui évoque les exemples – fournis par Bellarmin – des Papes Innocent III, Adrien II et autres, quoique dans un contexte légèrement différent :
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Les autorités qui soutiennent [la possibilité réelle qu’un Pape puisse devenir hérétique] ne prouvent rien. Tout d’abord, elles citent la déclaration faite par Innocent III dans son Sermon 2 relatif à la consécration du Souverain Pontife et où, parlant de lui-même, il dit : “La foi m’est nécessaire à un degré tel que bien que j’aie Dieu pour seul juge de [mes] autres péchés, je ne pourrais être jugé par l’Église que pour un péché commis dans la foi.” Toutefois, Innocent n’affirme pas – cela va de soi – que le cas est simplement possible, mais soulignant la nécessité de la foi, il la dit grande au point même qu’au cas où – la chose étant ou non dans le domaine du possible – un Pontife devrait être jugé déviant dans la foi, il serait déjà soumis au jugement de l’Église en raison de ce qui est exposé ci-dessus. Et de fait, la chose est analogue, d’une certaine manière, à ce qu’invoque l’Apôtre lorsque, souhaitant illustrer la vérité inaltérable de l’Évangile, il écrit : “Mais, quand nous-mêmes, quand un ange du ciel annoncerait un autre Évangile que celui que nous vous avons prêché, qu’il soit anathème !” »
(Billot, de Ecclesia, p. 630 ; c’est nous qui soulignons.)
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Dit simplement, quand saint Robert Bellarmin écrit qu’un Pape peut être jugé en cas d’hérésie, ce n’est là, de sa part, qu’une façon de s’exprimer, tout comme lorsque saint Paul écrit qu’un ange du Ciel qui prêcherait un faux Évangile serait anathème (voir Gal 1 : 8-9). Bellarmin ne veut pas dire qu’un inférieur peut légitimement rendre un jugement canonique contre le Pape, son supérieur, en vertu de quelque mystérieuse exception à la règle, alors que c’est bien là ce que Salza et Siscoe présentent de manière insistante comme étant sa position. En réalité, Bellarmin veut simplement dire que si un Pape devenait un hérétique public, il pourrait alors être jugé par ses inférieurs parce qu’il ne serait plus Pape, et c’est exactement là ce qu’il soutient dans le même chapitre d’où est extrait le passage en question.
De même, si le Pape Adrien II a pu dire qu’« en cas d’hérésie, un Pape peut être jugé », ce n’est pas parce que l’hérésie constitue en quelque sorte une exception au principe codifié par Vatican 1870 selon lequel nul ne peut juger le Pape, c’est parce que seule l’hérésie publique — avec le schisme et l’apostasie — est un péché qui, de par sa nature même, peut faire qu’un vrai Pape cesse d’être Pape : « Car toute faute, même un péché grave, n’a pas de soi pour résultat — comme le schisme, l’hérésie ou l’apostasie — de séparer l’homme du Corps de l’Église. » (Pape Pie XII, Encyclique Mystici Corporis, n. 23.)
Voici la raison pour laquelle un supérieur ne peut être jugé, pour ainsi dire, par ses inférieurs : parce qu’il n’est plus alors leur supérieur légitime et qu’étant un hérétique, il est coupé du Corps de l’Église.
C’est ce que veut dire saint Robert Bellarmin, et c’est également ainsi que le Cardinal Billot comprend ce Docteur de l’Église ; en effet, il ne contredit en rien saint Robert, ce qui serait pour le moins bizarre parce que c’est lui qui soutient, comme on l’a vu, qu’« en matière de responsabilité légale, le Souverain Pontife relèverait toujours du jugement d’inférieurs, ce qui constitue une parfaite contradiction » et que si l’on prévoyait une seule exception même pour le cas d’hérésie, il « n’existe plus la moindre raison pour laquelle la possibilité d’une déposition devrait se restreindre au seul cas d’hérésie […] et il ne reste plus rien qu’une règle volontariste sur laquelle vient se greffer une exception arbitraire. »
Il est vrai qu’un pape en carton peut PARFAITEMENT être retiré…
Nous voici enfin arrivés au terme de notre petite excursion. Nous sommes sûrement en train de décevoir les grandes gueules semi-traditionalistes qui se répandent actuellement sur l’Internet pour appeler à la déposition de François : désolés, les gars, mais si François est actuellement un vrai Pape, personne n’a le pouvoir de lui reprendre son pontificat. Il ne peut être ni retiré de son office, ni déposé. Vous êtes tout bonnement coincés avec lui. Bienvenue dans l’enseignement catholique relatif à la papauté.
La bonne nouvelle, cependant, c’est que François n’est pas actuellement un Pape valide et qu’il ne l’a d’ailleurs jamais été. Il n’est pas catholique, et il ne saurait donc être Pape, quel que le soit le nombre des « cardinaux » qui l’ont élu. Rappelez-vous ceci : ceux-là mêmes qui crient le plus fort que les sédévacantistes ont tort et que François est un Pape valide se précipitent pour refuser à ce « vrai Pape » la soumission qu’ils lui doivent. Ainsi que nous l’avons souligné dans notre “TRADCAST 012” (pour les anglophones !), ce n’est pas seulement que les traditionalistes de variété “R&R” « Reconnaître-tout-en-résistant » ont tort de croire que François est Pape, c’est bien pire encore : ils ont tort au sujet de la papauté.
Reconnaître Jorge Bergoglio comme Pape ne va pas sans conséquences. Nos opposants payent à présent le prix de leur position erronée selon laquelle un apostat public peut être un véritable et légitime successeur de saint Pierre.
*****
Source : Novus Ordo Watch : http://www.novusordowatch.org/wire/judging-deposing-true-pope.htm
Traduction : le CatholicaPedia.net
(Que notre traducteur soit encore une fois et toujours remercié pour son travail professionnel)
[1] Ndlr : En dehors d’un manuscrit par Chastillon, secrétaire du Cardinal du Perron (https://archive.org/stream/bibliothquedelac01back#page/n607/mode/1up), l’ouvrage « De Romano Pontifice » de Saint Robert Bellarmin, Docteur de l’Église, appartenant à ses Controverses « Disputationes de controversiis christianae fidei adversus hujus temporis haereticos » en 4 volumes :
Tome 1 : http://reader.digitale-sammlungen.de/de/fs1/object/display/bsb10635640_00003.html ;
Tome 2 : http://reader.digitale-sammlungen.de/resolve/display/bsb10635641.html ;
Tome 3 : http://reader.digitale-sammlungen.de/de/fs1/object/display/bsb10635642_00005.html ;
Tome 4 : http://reader.digitale-sammlungen.de/de/fs1/object/display/bsb10635643_00005.html ; avec le texte en cause extrait de « De Summo Pontifice » livre II, Chapitre XXVI (http://reader.digitale-sammlungen.de/de/fs1/object/display/bsb10635640_00426.html) n’a pas été édité publiquement en traduction française.
Cependant, une traduction française d’un résumé des Controverses, est parue en 1855, en 3 volumes, sous le titre de « Démonstration victorieuse de la foi catholique, extraite des controverses du R. Cardinal Bellarmin », traduite du latin par M. l’abbé Ducruet, Paris : Louis Vivès, 1855. Malheureusement, l’ouvrage de l’abbé Ducruet, « Démonstration victorieuse de la foi catholique » comprenant donc une traduction en français du « De Romano Pontifice » de Saint Robert Bellarmin, n’est pas disponible en lecture directe sur Internet, ni même disponible en achat d’occasion, on le trouve sur la catalogue de la BNF : http://cataloguelabs.bnf.fr/ark:/12148/cb300795591. Il semblerait que l’on puisse en obtenir la reproduction, au format PDF, sous forme de texte numérisé intégral, http://www.bnf.fr/fr/collections_et_services/reproductions_document/a.reproduction_document_tarifs.html.
[2] NdT (Wikipedia) : El Palmar de Troya est une entité locale autonome (entidad local autónoma) de la commune espagnole d’Utrera, dans la province de Séville, en Andalousie.
Ndlr : Ce fut un phare de la Tradition bien avant Mgr Lefebvre et Écône…
[3] NdT : Je n’ai malheureusement trouvé nulle part une traduction française de cette thèse écrite en latin ; cependant, pour les anglicistes, le site Novus Ordo Watch fournit la référence suivante : Cardinal Louis Billot on the Legitimacy of the Roman Pontiff (extrait de Tractatus de Ecclesia Christi, 5ème ed., 1927, Question 14, Thesis 29.
C’est infiniment cohérent avec la fonction de Pontife Suprême, tenant-lieu de Dieu sur la Terre, et guide Infaillible chargé du dépôt de la Foi de l’Église Catholique et du Salut des âmes.
Qui pourrait juger celui qui est l’autorité au dessus de toute les autorités ? qui n’agit pas en son nom mais au nom de Jésus Christ.
Cela expédie aux orties les hérésies de la Frat’, de l’usml et de Verrua qui prétendent précisément désobéir/juger leur « pontife » formel pour les uns matériel pour les autres.
La position Catholique Semper Idem est, à ce sujet, parfaitement Catholique, l’Église Catholique est éclipsée par la secte conciliaire, les deux sont parfaitement et absolument parallèles et opposés.
Au risque de lasser ou d’agacer tous nos lecteurs (déjà) très avertis, l’on ne répétera jamais assez cette évidence qu’un véritable Pontife, successeur de St Pierre, ne peut errer dans la foi selon le consentement unanime des Pères.
St. Thomas d’Aquin (1225 – 1274) est le plus grand de tous les docteurs de l’Église. Il est appelé « docteur commun », « docteur angélique » ou « ange de l’école », en raison de l’excellence de sa doctrine. Il a été souvent exalté par les papes. « Thomas, à lui seul, a plus illuminé l’Église que tous les autres docteurs. Sa doctrine n’a pu provenir que d’une action miraculeuse de Dieu » (Jean XXII : bulle de canonisation). Qu’enseigne donc ce docteur quasiment aussi infaillible que le pape ?
Le docteur angélique est partisan de l’infaillibilité absolue et permanente du souverain pontife : « L’Église apostolique [de Pierre], placée au-dessus de tous les évêques, de tous les pasteurs, de tous les chefs des Églises et des fidèles, demeure pure de toutes les séductions et de tous les artifices des Hérétiques dans ses pontifes, dans sa foi toujours entière et dans l’autorité de Pierre. Tandis que les autres églises sont déshonorées par les erreurs de certains hérétiques, seule elle règne, appuyée sur des fondements inébranlables, imposant silence et fermant la bouche à tous les hérétiques; et nous [… ], nous confessons et nous prêchons en union avec elle la règle de la vérité et de la sainte tradition apostoliques » (citation de St. Cyrille d’Alexandrie reprise par St. Thomas dans saChaîne d’or, à l’endroit où il commente Matthieu XVI, 18).
S’appuyant sur Luc XXII, 32, le docteur commun enseigne que l’Église ne peut errer, parce que le pape ne peut errer. « L’Église universelle ne peut errer, car Celui qui est exaucé en tout au titre de sa dignité a dit à Pierre, sur la profession de foi duquel est fondée l’Église : J’ai prié pour toi pour que ta foi ne défaille point » (Somme théologique, supplément de la IIIe partie, q. 25, a. 1).
« L’unité de foi pourrait être maintenue dans l’Église, comme l’exige l’Apôtre (1. Corinthiens I,10), si les questions soulevées au sujet de la loi n’étaient définies par le chef de l’Église, le souverain pontife » (Somme théologique, II-II, q. 1, a.10).
« Une fois que les choses ont été décidées par l’autorité de l’Église universelle celui qui refuserait opiniâtrement de se soumettre à cette décision, serait hérétique. Cette autorité de l’Église réside principalement dans le souverain Pontife. Car il est dit (Décret. XXIV, q. I., ch. 1.2) : « Toutes les fois qu’une question de foi est agitée, je pense que tous nos frères et tous nos collègues dans l’épiscopat ne doivent s’en rapporter qu’à Pierre, c’est-à-dire à l’autorité de son nom et de sa gloire ». Ni les Augustin, ni les Jérôme, ni aucun autre docteur n’ont défendu leur sentiment contrairement à son autorité. C’est pourquoi saint Jérôme disait au pape Damase (in expo. symbol.) : « Telle est la foi, très-saint Père, que nous avons apprise dans l’Église catholique : si dans notre exposition il se trouvait quelque chose de peu exact ou de peu sûr, nous vous prions de le corriger, vous qui possédez la foi et le siège de Pierre. Mais si notre confession reçoit l’approbation de votre jugement apostolique, quiconque voudra m’accuser prouvera qu’il est ignorant ou mal intentionné, on qu’il n’est pas catholique. Mais il ne prouvera pas que je suis hérétique » (Somme théologique II-II. q 11.a.2).
« Il faut s’en tenir à la sentence du Pape à qui il appartient de prononcer en matière de foi, plutôt qu’à l’opinion de tous les sages » (Quaetiones quodlibetales q. 9.a 16)
Dans le Psaume XXXIX. 10 il est écrit : « J’ai annoncé ta justice dans la grande assemblée ». Voici le commentaire de St. Thomas. Le psalmiste a parlé « dans la grande assemblée », c’est-à-dire dans l’Église catholique, qui est grande par son pouvoir et sa fermeté : « Les portes de l’enfer ne prévaudront point contre elle » (Matthieu XVI, 18) » (St. Thomas : Commentaire sur les psaume). Cette « fermeté », l’Église la doit en première ligne à la foi sans faille du pontife romains comme il est expliqué dans l’un des Opuscules du saint docteur :
L’Église est une, sainte, catholique et « ferme ». « Quatrièmement, elle est ferme. Une maison est ferme 1. quand ses fondations sont solides ». La véritable fondation de l’Église est le Christ (1. Corenthiens III, 2) et les douze apôtres (Apocalypse XXI, 14). Pour suggérer la fermeté, Pierre est appelé le roc. « 2. La fermeté d’une maison apparaît en outre quand elle ne peut être renversée par une secousse ». L’Église n’a pu être renversée ni par les persécuteurs, ni par les séductions du monde, ni par les hérétiques. D’aprèsMatthieu, XVI, 18, les « portes de l’enfer » (= les hérétiques) peuvent l’emporter sur telle ou telle église locale, mais point contre l’Église de Rome où réside le pape. « C’est pour cette raison que seulement l’Église de Pierre (à qui fut attribué l’Italie lors de l’envoi des disciples) demeurera toujours ferme dans la foi. Et tandis qu’ailleurs la foi n’y est pas du tout, ou bien mêlée avec beaucoup d’erreurs, l’Église de Pierre, elle, est forte dans la foi et pure de toutes les erreurs, ce qui n’est pas étonnant, vu que le Seigneur a dit à Pierre : « J’ai prié pour toi, pour que ta foi ne défaille point » (St. Thomas : Opuscula, opuscule intitulé Expositio symboli apostolorum, passage relatif à l’article « je crois… en l’Église catholique » du Symbole des Apôtres).
L’enseignement du docteur angélique peut donc se résumer ainsi : la foi du pape est d’une fermeté absolu et permanente.
La doctrine du docteur angélique doit être « tenue religieusement » (sancte) par tous les professeurs de séminaires (canon 1366, § 2) ! L’Église donne à entendre par là combien elle juge nécessaire que les jeunes séminaristes (qui plus tard formeront le bas et le haut clergé) suivent en tout le docteur commun. Saint Pie X disait : « S’écarter de St. Thomas ne va jamais sans grave danger » (motu proprio Sacrorum antistitum 1er septembre 1910). Et encore : « Ceux qui s’éloignent de saint Thomas sont par là même conduits à cette extrémité qu’ils se détachent de l’Église » (Lettre Delata Nobis, 17 novembre 1907, adressée au Père Thomas Pègues).
St. Irénée de Lyon, (v.130 – v. 208) loua « l’Église très grande, très ancienne et connue de tous, que les deux très glorieux apôtres Pierre et Paul fondèrent et établirent à Rome […]. La tradition qu’elle tient des Apôtres et la foi qu’elle annonce aux hommes sont parvenues jusqu’à nous par des successions d’évêques […]. Avec cette Église, en raison de son origine plus excellente, doit nécessairement s’accorder toute l’Église, c’est-à-dire les fidèles de partout » (Contre les Hérésies III, 3, 2). Saint Irénée enjoignait donc aux fidèles d’aligner leur foi sur celle du pontife romain, parce que ce dernier transmettait intacte la tradition venue des apôtres.
St. Cyprien (v. 200 – 258) défendit l’autorité et l’infaillibilité pontificale dans son célèbre traité Sur l’unité de l’Église. « Celui qui ne garde pas l’unité de l’Église, croit-il qu’il garde la foi ? Celui qui s’oppose à l’Église, qui abandonne la chaire de Pierre sur laquelle est fondée l’Église, peut-il se flatter d’être encore dans l’Église ? » (De unitate Ecclesiae, ch. 4). « La chaire de Pierre est cette Église principale d’où est sortie l’unité sacerdotale auprès de laquelle l’erreur ne peut avoir d’accès » (Lettre 40 et 55).
St. Athanase (v. 295 – 373) se servit d’une lettre d’un pape pour lutter contre les hérétiques ariens. Le pape St Denys avait écrit, vers l’an 260, une lettre doctrinale à Denis, l’évêque d’Alexandrie, où il condamna l’hérésie des sabelliens, qui devait être reprise plus tard par les ariens. C’est pourquoi saint Athanase reprocha aux ariens d’avoir déjà été condamnés depuis longtemps par un jugement définitif, ce qui prouve qu’il croyait en l’infaillibilité pontificale (De sententia Dionysii). Dans une lettre à Félix, il écrivit cette phrase mémorable : « l’Église romaine conserve toujours la vraie doctrine sur Dieu »
St. Éphrem (v. 300 – 373), le grand docteur de l’Église syriaque, célébra la grandeur de l’enseignement pontifical, continuellement assisté par le Saint-Esprit : « Salut, ô sel de la terre, sel qui ne peut jamais s’affadir ! Salut, ô lumière du monde, paraissant à l’Orient et partout resplendissante, illuminant ceux qui étaient accablés sous les ténèbres, et brûlant toujours sans être renouvelée. Cette lumière, c’est le Christ ; son chandelier c’est Pierre ; la source de son huile, c’est l’Esprit-Saint » (Enconium in Petrum et Paulum et Andream, etc.)
St. Épiphane (v. 315 – 403) interpréta Matthieu XVI,18. Il affirma qu’il était impossible que l’Église Romaine fût vaincue par les portes de l’enfer, c’est-à-dire par les hérésies, parce qu’elle était appuyée sur la foi solide de Pierre, auprès de qui on trouvait la bonne réponse à toutes les questions, doctrinale. « À Pierre, le Père manifeste son propre Fils, et c’est pour cela qu’il est appelé bienheureux. Pierre à son tour manifeste le Saint-Esprit [dans son discours aux juifs, le jour de la Pentecôte], ainsi qu’il convenait à celui qui était le premier entre les apôtres, à celui qui était la pierre inébranlable sur laquelle l’Église de Dieu est fondée, et contre laquelle les portes de l’enfer ne prévaudront pas. Par ces portes de l’enfer il faut entendre les hérésies et les auteurs, des hérésies. En toutes manières, la foi est fondée solidement en lui : il a reçu les clefs du ciel, il délie et lie sur la terre et au ciel, en lui se résolvent les questions de la foi les ardues » (Anchoratus. Ch. 9)
St. Basile (329 – 379) informa son ami saint Athanase qu’il avait l’intention de demander au souverain pontife d’exercer son autorité pour exterminer l’hérésie de Marcel d’Ancyre (Lettre 69). « La lettre de saint Basile, mentionnant cette demande d’intervention de l’évêque de Rome comme une affaire courante et ordinaire, attire à conclure qu’à cette époque c’était non seulement la conviction personnelle de Basile, mais aussi la conviction de tous, même en Orient, que l’évêque de Rome possède le pouvoir de juger souverainement, par lui-même, les questions doctrinales » (Vacant et Mangenot : Dictionnaire de théologie catholique, article « infaillibilité du pape »). Pourquoi consulter Rome et pas une autre autorité ? « Pierre », dit saint Basile, « fut chargé de former et de gouverner l’Église, parce qu’il excellait dans la foi » (Contra Enom, livre 2). Grâce à la promesse du Christ, le pape persévérait absolument sans aucune défaillance, car sa foi avait la même stabilité que celle du Fils de Dieu Lui-même ! « Pierre a été lancé placé pour être le fondement. Il avait dit à Jésus Christ : Vous êtes le Christ, Fils du Dieu vivant », et à son tour il lui fut dit qu’il était Pierre, quoiqu’il ne fut pas pierre immobile, mais seulement par la volonté de Jésus-Christ. Dieu communique aux hommes ses propres dignités. Il est prêtre, et il fait des prêtres ; Il est pierre, et il donne la qualité de pierre, rendant ainsi ses serviteurs participants de ce qui lui est propre » (Homélie 29). Ce dernier passage de saint Basile jouit d’une autorité particulière dans l’Église catholique, puisqu’il fut inséré dans le catéchisme du concile de Trente (explication du symbole, section Credo in… Ecclesiam).
St. Grégoire de Naziance (v. 330-390) loua l’indéfectibilité de la foi romaine dans un poème. « Quant à ce qui est de la foi, l’ancienne Rome, dès le principe comme aujourd’hui, poursuit heureusement sa course, et elle tient l’occident tout entier dans les liens de la doctrine qui sauve » (Carmen de Vita sua, vers 268 – 270).
St. Grégoire de Nysse (mort en 394), frère cadet de saint Basile, affirma : « L’Église de Dieu à sa solidité dans Pierre, car c’est lui qui, d’après la prérogative qui lui a été accordée par le Seigneur, est la pierre ferme et très solide sur laquelle le Sauveur a bâti l’Église » (Laudat. 2 in St. Stephan vers la fin).
St. Ambroise (340 – 397) interpréta le passage de Luc XXII, 32 en ce sens que le Seigneur avait affermi la foi de Pierre, afin que, « immobile comme un rocher », elle pût soutenir efficacement l’édifice de l’Église (Sermon 5). Dans sa glose sur le Psaume XL, Ambroise établit une équation qui allait devenir célèbre : « Là où est Pierre, là est l’Église. Là où est l’Église n’est pas la mort, mais la vie éternelle » Ennarratio in Psalmum X, ch. 19). Autant dire : hors du pape, point de salut.
St. Jean Chrysostome (340 – 407) est le plus célèbre des Pères grecs. En raison de ses enseignements admirables, il mérita le surnom de « chrysostome », c’est-à-dire « bouche d’or ». Saint Jean Chrysostome suggéra la solidité admirable de la foi de Pierre par une image : « Il y a beaucoup de flots impétueux et de cruelles tempêtes, mais je ne crains pas d’être submergé, parce que je me tiens sur la pierre. Que la mer s’agite furieuse, peu m’importe : elle ne peut renverser cette pierre inébranlable » (Lettre 9 à Cyriaque). Il insista sur l’étymologie symbolique du nom du premier pape : « Saint Pierre a été ainsi nommé, en raison de sa vertu. Dieu a comme déposé dans ce nom une preuve de la fermeté de l’apôtre dans la foi » (Quatrième Homélie sur les changements de noms).
St. Jérôme (v.347-420), dans sa lettre au pape Damase, défendit rigoureusement la nécessité d’être uni au pontife romain. « J’ai cru que je devais consulter la chaire de Pierre et cette foi romaine louée par saint Paul (…). Vous êtes la lumière du monde, vous êtes le sel de la terre. Je sais que l’Église est bâtie sur cette pierre ; quiconque aura mangé l’agneau hors de cette maison, est un profane » (Lettre 15). D’après saint Jérôme, les fidèles pouvaient en toute sûreté suivre les enseignements pontificaux, car la chaire de Pierre gardait incorruptiblement l’héritage de la foi : « La sainte Église romaine, qui est toujours demeurée sans tache, demeurera encore dans tous les temps à venir ferme et immuable au milieu des attaques des hérétiques, et cela par une protection providentielle du Seigneur et par l’assistance du bienheureux Pierre (in : Mgr de Ségur : Le Souverain Pontife, in Œuvres complètes Paris 1874, t. III, p. 80).
St. Augustin (354 – 430) fit une interprétation très pertinente de Luc XXII, 32. Avant de la reproduire ici, signalons que le pape Léon XIII, après avoir mis en valeur les talents de chacun des Pères de l’Église, conclut en affirmant qu’« entre tous, la palme semble revenir à St. Augustin » (Encyclique Aeterni Patris,, 4 août 1879). L’évêque d’Hippone fut donc le plus grand des Pères de l’Église. Or il se prononça catégoriquement en faveur de l’infaillibilité permanente du pontife romain ! Voici son texte magistral :
« Si, défendant le libre arbitre non selon la grâce de Dieu, mais contre elle, tu dis qu’il appartient au libre arbitre de persévérer ou de ne pas persévérer dans le bien, et que si l’on y persévère, ce n’est pas par un don de Dieu, mais par un effort de la volonté humaine, que machineras-tu pour répondre à ces paroles du Maître : « J’ai prié pour toi, Pierre, afin que ta foi ne défaille pas » ? Oseras-tu dire que malgré la prière du Christ pour que la foi de Pierre ne défaille pas, cette foi eût défailli néanmoins, si Pierre avait voulu qu’elle défaillît, c’est-à-dire s’il n’avait pas voulu persévérer jusqu’à la fin ? Comme si Pierre eût pu vouloir autre chose que ce que le Christ demandait pour lui qu’il voulût ! Qui ignore que la foi de Pierre devait périr, si sa propre volonté, la volonté par laquelle il était fidèle, défaillait, et qu’elle devait demeurer jusqu’au bout, si sa volonté restait ferme ? Mais puisque la volonté est préparée par le Seigneur, la prière du Christ pour lui ne pouvait être vaine. Quand il a prié pour que sa foi ne défaille pas, qu’a-t-il demandé en définitive, sinon qu’il ait une volonté de croire à la fois parfaitement libre, ferme, invincible et persévérante ? Voilà comment on défend la liberté de la volonté, selon la grâce, et non contre elle. Car ce n’est pas par sa liberté que la volonté humaine acquiert la grâce, mais plutôt par la grâce qu’elle acquiert sa liberté, et pour persévérer, elle reçoit, en outre, de la grâce le don d’une stabilité délectable et d’une force invincible » (De la correction et de la grâce, livre VIII, ch. 17).
St. Cyrille d’Alexandrie (380 – 444), dans son Commentaire sur Luc (XXII, 32), expliqua que l’expression « confirme tes frères » signifiait que Pierre était le maître et le soutien de ceux qui venaient au Christ par la foi. Il commenta également l’évangile selon St. Matthieu. « D’après cette promesse (Tu es Petrus … ), l’Église apostolique de Pierre ne contracte aucune souillure de toutes les séductions de l’hérésie (St. Cyrille, in : St. Thomas d’Aquin : Chaîne d’or sur Matthieu XVI, 18).
St. Fulgence de Ruspe (467 – 533) constata. « Ce que l’Église romaine tient et enseigne, l’univers chrétien tout entier le croit sans hésitation avec elle » (De incarnatione et gracia Christi, ch. 11).
St. Bernard (1090 – 1153) fut le dernier des Pères de l’Église. Citons quelques paroles, qui serviront de conclusion : « Les atteintes qui sont portées à la foi doivent être réparées précisément par celui dont la foi ne peut être en défaut. C’est là la prérogative de ce Siège » (De error Abaelardi, préface).
Aucun Père ne parle de la possibilité (même purement théorique) qu’un pape puisse errer dans un seul instant. « C’est principalement pour l’explication de la parole sainte qu’ils [les Pères de l’Église] demeureront toujours nos maîtres. Nulle recherche, nulle science. si profonde soit-elle, ne nous rendra ce qu’ils avaient alors : le monde tel que Jésus l’avait connu, le même aspect des lieux et des choses, et surtout l’entretien des fidèles Lui, ayant vécu près des apôtres, pouvaient rapporter leurs instructions. Ces circonstances réunies donnent à l’autorité des Pères un tel éclat, que les théologiens protestants eux-mêmes en ont été frappés. Ils l’avouent : « S’écarter d’un sentiment commun parmi eux, c’est une folie et une absurdité » (Abbé C. Fouard : La vie de Notre-Seigneur Jésus Christ vingt-sixième édition, Paris 1920, p XVI.
Le 13 novembre 1564, le Pape Pie IV instaura l’obligation pour tout le clergé de jurer obéissance à une profession de foi, qui disait, entre autres : « J’interpréterais toujours l’Écriture selon le consentement unanime des Pères ».
BRÈVES RÉFLEXIONS
On ne peut que souscrire à ce beau rappel patristiques. Mais il y a eut depuis une évolution de la Contre-Église et de sa perversité, les Pères n’ont pas connus la F.M.
Mgr Fellay est un suisse valaisan ayant fait des études de comptabilité, c’est un homme du concrèto-concret, de l’hypothèse.
« C’est également une preuve de soumission peu sincère que d’établir une opposition entre Souverain Pontife et Souverain Pontife. Ceux qui, entre deux directions différentes, repoussent celle du présent pour s’en tenir au passé ne font pas preuve d’obéissance envers l’autorité, qui a le droit et le devoir de les diriger, et ressemblent sous quelques rapports à ceux qui, après une condamnation, voudraient en appeler au futur Concile ou à un Pape mieux informé ». (Léon XIII, Lettre apostolique Epistola Tua)
C’est face à l’opposition que faisaient les opposants au ralliement en s’appuyant sur Pie IX et le Syllabus, ainsi que Quanta Cura, que Léon XIII écrivit cela. Les divisions des monarchistes et royalistes faisant les beaux jours de la république, Léon XIII pensait qu’une fois la république acceptée le combat pour une bonne législation serait possible, or force est de constater qu’il a ignoré, sinon minimisé, l’anticatholicisme de la république maçonnique, en semblant croire que les républicains étaient contre l’Église à cause de l’antirépublicanisme des monarchistes.
La résistance du Comte de Paris, se fit au nom du gallicanisme libéral, elle est donc doublement condamnable, dans son principe et dans son motif. Ceux qui rallièrent furent assez vite engloutis et neutralisés par la « souveraineté du peuple » et la révolution pu continuer ses ravages, qu’elle poursuit encore actuellement et éradiquer petit à petit le catholicisme au profit de toutes les sectes protestantes, judaïques et islamiques. La question du Pape ne préoccupe pas les gallicans, les jansénistes, les bonapartistes, les nationaux-socialistes, les jeanned’arcistes…touts ceux qui sont pour l’autonomie complète de l’ordre politique, qui ne s’occupent que des choses de César en oubliant les devoirs de César vis-à-vis de Dieu.
Certains nous disent que le problème n’est pas celui du Pape, or il semble pourtant que c’est le fondement du problème, ubi Petrus, ibi Ecclesia. Le Pape philo-B’Naï B’Rith, le Pape philo-cocos, le Pape ayant, plus que quiconque, le culte de l’homme, le Pape démolisseur de la Liturgie millénaire, le Pape complice de la maçonnerie………… en un mot le Pape selon nos besoins. Et si : can. 1556 « Prima Sedes a nemine indicatur » can.218
p.1 Le Pontife Romain successeur de Saint Pierre dans sa primauté, a non seulement la primauté d’honneur, mais le pouvoir de juridiction suprême et entier sur l’Église Universelle, tant dans les matières qui concernent la foi et les mœurs, que dans celles qui se rapportent à la discipline et au gouvernement de l’Église répandue dans le monde entier.
p.2 Ce pouvoir est vraiment épiscopal, ordinaire et immédiat, s’exerçant tant sur toutes les églises et chacune d’entre elles que sur tous les pasteurs et tous les fidèles et chacun d’entre eux ; ce pouvoir est indépendant de toute autorité humaine. can.219 Le Pontife romain, légitimement élu, obtient de droit divin, immédiatement après son élection, le plein pouvoir de souveraine juridiction. Il semble bien que le problème soit éminemment celui du Pape.
On peut aussi se poser les questions : dans quelle mesure un Pape peut-il être en contradiction avec ses prédécesseurs, avec le Magistère antérieur ? Peut-il être Pape tout en étant condamné pour modernisme, libéralisme, américanisme, panchristianisme…… ? Peut-il imposer une nouvelle religion, un nouveau culte… ? Peut-il se réconcilier unilatéralement avec tous les ennemis historiques de l’Église ? Peut-il seconder les desseins de la Contre-Église ?…..
Ceux qui le considère comme Pape et lui résistent sont fautifs sans doute, mais ceux qui se contentent de préserver la validité des sacrements, par des consécrations épiscopales sans dénoncer publiquement celui qu’ils considèrent comme un intrus le sont aussi. Ceux qui résistent sont coupables de ne pas étudier la question, cependant souvent ils ne possèdent pas l’autorité pour trancher.
Seul Élie Patriarche du Patriarcat Catholique Byzantin semble avoir pris publiquement position. Mais François ne fait, en fin de compte, que pratiquer ce que Paul VI a mis en place et que ses successeurs ont entériné.
Le simple fidèle, le simple prêtre, n’ayant aucune autorité pour prononcer solennellement une telle sentence, ne peut, pour conserver et témoigner de sa foi, que résister.
BRÈVES MÉDITATIONS ET CONSIDÉRATIONS :
« En dépit des talents déployés et des sacrifices consentis par le meilleur des catholiques de France, toutes les tentatives faites dans notre pays depuis près de deux siècles pour l’arracher à la Révolution — « c’est-à-dire renversement, parce que je mets en haut ce qui, selon les lois éternelles, doit être en bas, et en bas ce qui doit être en haut » — et pour le faire revenir à sa vocation de « bon sergent de Dieu » (saint Louis), de « saint Royaume » (Jehanne d’Arc) ont échoué, parfois dramatiquement.
Les raisons avancées pour expliquer ces échecs ne sont pas dépourvues de pertinence : influence des sociétés secrètes et de leur propagande, déchristianisation consécutive et laïcisation toujours plus accentuée des institutions, disparition des élites catholiques, illusions électoralistes, avancées du marxisme et du libéralisme après les deux guerres mondiales, éclipse de l’Église catholique par l’église Conciliaire après Vatican II.
Mais ces explications demeurent partielles. Plus gravement, encore, elles passent à côté de l’essentiel. Elles occultent la seule raison de fond, L’APOSTASIE OFFICIELLE DE NOTRE PAYS, que les combats menés n’ont pas ouvertement remise en cause, seul combat que la Divine Providence pouvait couronner de succès : « Depuis que le nom de Dieu est sorti pour la première fois de ta constitution, je t’adjure aujourd’hui de montrer les fruits de [cette] expérience. Je prête l’oreille et j’entends un murmure confus qui éclate de toutes parts. Ô mon pays, je ne te juge point témérairement, puisque je te juge d’après tes propres paroles : Ex ore tuo te judico. Il n’y a plus de moralité, plus de justice ; tout s’en va, tout dépérit, tout est à refaire, la société a besoin d’une réforme générale ; tel est l’aveu qui s’échappe de tous les coins du pays. Voilà donc les résultats, voilà donc les progrès obtenus depuis que nous avons donné l’exclusion à Dieu… Si le dogme de l’existence de Dieu ne se trouve plus dans la loi, la raison de la loi ne se trouve plus dans la loi, et la loi n’est qu’un mot, elle n’est qu’une chimère » (Cardinal Pie, Œuvres, tome II, pages 627-629).
Ne dirait-on pas que ces paroles ont été prononcées hier ? Elles font le diagnostic de la France depuis 1789 ; et aucune partie du peuple français ne peut rejeter sur l’autre cette situation — ce qui accroît le désespoir —, car « le tort est à tous, parce qu’il est dans une situation dont la responsabilité remonte à tous » (Cardinal Pie, Œuvres, tome VII, page 543). Il s’agit bien du péché public de la Nation tout entière.
Lorsqu’après le triomphe de la Foi catholique sur le paganisme romain — avec l’Édit de Milan de l’empereur Constantin —, l’Église catholique eut pleine liberté de prêcher la religion du Salut, la lutte se poursuivit contre le Prince de ce monde et ses séides, « les hommes pervers ». Conservant son aspect spirituel, la lutte prit alors aussi un aspect temporel, les rois et princes chrétiens, un Clovis, un Charlemagne, un saint Louis, et bien d’autres, renversant et défaisant des chefs hérétiques ou repoussant les invasions musulmanes.
Ce double aspect du combat de la Foi n’a pas disparu, c’est le fondement même de la Doctrine des Deux Glaives. Et l’on voit bien que la disparition des États chrétiens a accéléré le recul de l’Église, elle-même privée des États pontificaux (20 septembre 1870). La ruine de cette « féconde collaboration » entre le glaive spirituel et le glaive temporel a rendu possible la conquête intérieure, jusqu’au sommet (Vatican II, « papes conciliaires »), de l’Église, société ecclésiastique. Privée de l’appui du glaive, l’Église « a été captée dans sa marche par ses ennemis » :
« L’empereur apparaissait dans le monde comme le défenseur de la Vérité désarmée, et le Pape comme le prédicateur indépendant de la Vérité souveraine. Pour rendre cette indépendance plus certaine encore et plus durable, l’empereur jugea qu’il était nécessaire de donner au Souverain pontife un véritable royaume, afin que ce gardien de la doctrine n’eût à recevoir d’aucun autre roi une hospitalité périlleuse pour sa liberté » (Léon Gautier, préface au Charlemagne d’Alphonse Vétault).
Devant la situation de catastrophe absolue dans laquelle se trouvent au moment présent, « la patrie et la foi » (Pie XII, Radio-message pour le cinquième centenaire de la réhabilitation de Jehanne d’Arc, 25 juin 1956), quel(s) remède(s) employer ? Évidemment pas les remèdes proposés par l’usurpation révolutionnaire. Évidemment non plus, les « solutions restauratrices » qui se sont trompées sur le diagnostic, pour déboucher soit sur des échecs retentissants, soit sur de plus grands malheurs.
« On a essayé de tout : l’heure ne serait-elle pas venue d’essayer la vérité ? ». Ce n’est pas en vain que le pape Léon XIII enseigne dans l’encyclique Rerum novarum (15 mai 1891) :
« À qui veut régénérer une société quelconque en décadence, on prescrit avec raison de la ramener à ses origines. La perfection de toute société consiste, en effet, à poursuivre et à atteindre la fin en vue de laquelle elle a été fondée, en sorte que tous les mouvements et tous les actes de la vie sociale naissent du même principe d’où est née la société. »
Sur quelles bases alors repose la Chrétienté ? SUR LA PAPAUTÉ INFAILLIBLE ET L’ÉPISCOPAT en communion avec le Saint-Siège, unis dans le Magistère ordinaire universel. SUR LA ROYAUTÉ SACRALE ET LA CHEVALERIE CHRÉTIENNE, institutions d’Église, dont les sacramentaux confèrent « un certain caractère » à ceux qui les reçoivent.
Contra spem in spe, nous croyons contre toute logique humaine, mais dans l’Espérance, vertu théologale, que l’Église divinement instituée par Notre Seigneur Jésus-Christ sortira victorieuse de l’effroyable crise de la foi qu’elle connaît depuis des décennies, crise qui a d’ailleurs commencé bien avant 1962 !
De même, nous croyons, que la France sortira de son apostasie officielle pour renouer avec sa vraie histoire, le Pacte de Tolbiac et le Sacre de Reims.
IL FAUDRA ALORS REFAIRE LA CHRÉTIENTÉ, AVEC LES MOYENS DE LA CHRÉTIENTÉ.
S’il ne nous appartient pas de « restaurer l’Église » , œuvre de Dieu seul « jaloux de Sa gloire », il nous appartient, en revanche, d’œuvrer, en dépit des faiblesses de notre humaine infirmité, à la restauration de ce concept de de combat réellement catholique selon le vieil adage : « En nom Dieu, les hommes d’armes combattront et Dieu donnera la victoire » (sainte Jehanne d’Arc).
Peut-être ne verrons-nous pas la fin de cette bataille, mais nous aurons « combattu le bon combat, achevé (la) course, gardé la foi » (II Tim, IV, 7). Nous voulons seulement être jugés sur notre fidélité — fidélité a la même racine que foi (fides) — : « Ceux qui sèment dans les larmes, moissonneront dans l’allégresse » (Ps. 126, 5).
Et pour terminer, je voudrais rappeler à Ludovicus, en toute amitié, que lorsque l’ex-chanoine Roca, prêtre occultiste et initié, déclarait que « Je crois que le culte divin tel que le règlent la liturgie, le cérémonial, le rituel et les préceptes de l’Église romaine subira prochainement dans un Concile œcuménique une transformation qui tout en lui rendant la simplicité de l’âge d’or apostolique le mettra en harmonie avec l’état de la conscience et de la civilisation moderne », il ne parlait pas d’abord du Pape, mais d’un CONCILE ŒCUMÉNIQUE qui transformerait entièrement la Sainte Église en une contre-Église, véritable contre-façon diabolique. Le « Pape » à EUX n’en étant que la résultante nécessaire et suffisante……………
« La papauté tombera, elle mourra sous le couteau sacré que les Pères du dernier concile forgeront. Le César pontifical est l’hostie consommée pour le sacrifice. »
Ce brillant article démontre l’unique et exacte signification du concept de « jugement du pape ».
La tradition promène sa gauche légaliste et « intelligente » sur la voie sans issue des « vagues ambigüités » qui ne seront plus jamais des « hérésies formelles »,
elle fait gambader sa droite mystico-dingo sur une autre voie sans issue de la Sainte Église Catholique qui, infailliblement, « se ferait péché » maintenant et antichrist : deux folies contradictoires affirmées ensemble.
Avec ces intellos initiés S. et S., « Talleyrand et Fouché », elle invite son marais mou, opportuniste, apeuré par cette Révolution dévoilant trop vite sa face obscène, dans la voie sans issue d’un « juste milieu » de la déposition inepte d’un « Pape infailliblement élu ».
Mais en attendant la prochaine voie sans issue, encore plus niaisement mystificatrice, que cette « tradition » concoctera face à l’Imposture toujours plus insolente, comment s’étonner de ce labyrinthe d’impasses, puisqu’il est bricolé sur cette grossière imbécilité de base, exprimée ainsi par John DALY :
« en nous interdisant de juger si un individu est ou non le Pape, Davies nous impose en fait d’admettre sans la moindre critique que n’importe qui est fondé à se prétendre pape. Après tout, si la prétention de Jean-Paul II ne peut être mise en doute, pourquoi serait-on autorisé à mettre en doute la même prétention de la part de quelqu’un d’autre, tel le sieur Clemente Domínguez Gómez, d’El Palma de Troya. »
Donc merci à Vatican d’Eux ! « n’importe qui serait fondé à se prétendre pape », AUJOURD’HUI, ET DEMAIN !!
Issu de la secte conciliaire et converti à la Foi Catholique depuis 5 ans, vous abordez et répondez avec clarté à une question qui me taraude depuis longtemps.
Soyez remercié de votre étude, que je viens de parcourir, et que je vais prendre le temps d’approfondir.
Deo gratias
Merci Gilbert.
…Morin, vous voyez que la conversion n’est jamais venue que « par soit-même »… en répondant à la Grâce de Dieu.
Lire « La voix des francs » N°40 d’avril 2016 article :
Introduction de Satan au Vatican, en plein concile le 29 juin 1963 !
Un rituel satanique et une brochette de cardinaux félon à l’œuvre. Ceci explique cela : la réalité y dépasse la fiction.
Pour lire LVF n° 40 :
► http://saint-remi.fr
► Pour s’abonner à « La Voix des Francs » :
http://saint-remi.fr/fr/79-revue-la-voix-des-francs
Cher Jean-François Costes…excellent numéro qu’il faut (re)lire avec nos yeux et nos cœurs de 2016 !
Qui après n’osera pas comprendre que cette contre-façon d’« église » que nous voyons à l’œuvre depuis plus d’un demi-siècle n’est que le LEURRE mis en place par ceux qui détiennent réellement le pouvoir au sein de ce grand machin cranmérien et moderniste ? Les « félons » comme vous dites, ont réussi à changer la substance même de la foi et ont abouti à ce tour de force satanique d’imposer à l’ensemble de la chrétienté une nouvelle religion, en apparence toujours « catholique », mais aux rites et sacrements invalides, corrompus, blasphématoires, sacrilèges et exempts de toute grâce sanctifiante, cette dernière ayant disparu avec les canaux qui permettaient de la dispenser…
Ce qui me permet d’affirmer que les traditionalistes n’aiment tant que leur fiction qui s’éloigne de façon impressionnante de la réalité… Mysterium iniquitatis ! Ils en paieront le prix lorsque l’heure de Dieu aura sonné !
Et n’oublions pas : « Le but immédiat de chaque Cérémonial consistait à vénérer ‘l’Abomination de la Désolation’. Le but ultime, lui, était de
veiller à ce que rien ne puisse s’opposer à la force grandissante du
‘Prince’ en la Citadelle Catholique Romaine, une force quasiment
irrésistible. » (fin de citation)