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Bienheureux Charlemagne

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« Salut, ô Charles, bien-aimé de Dieu, Apôtre du Christ, rempart de Son Église, … » (Dom Guéranger).

8142014 : il y a 1 200 ans cette année que Charlemagne est mort, et c’est son Dies natalis, sa naissance au Ciel, qui est fêté chaque 28 janvier.

Charles 1er dit Charlemagne (Carolus Magnus), empereur d'Occident

 

Saint-Charlemagne - Patron des ÉcoliersPlus décrié que jamais, le Bienheureux Charlemagne fondateur des écoles doit se retourner dans sa chasse de la cathédrale d’Aix-la-Chapelle à cause de toutes les menaces et monstruosités actuelles concernant les enfants, leur instruction et leur éducation.

Raison de plus pour l’honorer et demander son intercession.

Cet empereur fut canonisé par l’anti-pape Pascal III le 29 décembre 1165. Cette canonisation, faite par un antipape, ne fut jamais contestée par un Pontife romain. On lui reprochera peut-être d’avoir péché mais ne peut-on pas le reprocher au Saint Roi David ? Nombreuses églises (cathédrales, collégiales ou autres) l’honorent comme Saint. À Aix-la-Chapelle sa fête se célébrait avec le rit double de 1 ère classe.

Jamais il ne monta à cheval sans vénérer une médaille de la Très Sainte Vierge Marie, toujours, il mit son épée au service de la Sainte Église, c’est pourquoi, il n’essuya aucun revers et aucune défaite. En conséquence, il a droit au surnom de « Charles le Victorieux ». Charles le Grand fut également qualifié de « Très Chrétien » par un concile de Mayence. Initialement, l’Université de Paris (la Sorbonne) le choisit comme Saint Patron. En raison de la haine des protestants, au XVI ème siècle, elle abandonna ce saint patronage mais elle y revint en 1661.

Sainte Jeanne d’Arc déclara à ses juges que Saint Louis et Saint Charlemagne s’étaient agenouillés devant Dieu pour obtenir le salut de la France.

En nos jours bien sombres, supplions ce grand prince d’implorer de Dieu et de Marie le salut de notre Patrie et même de l’ Église.

Pourquoi peut-on considérer Charlemagne comme bienheureux ? Ne lui reproche-t-on pas le massacre de saxons, ses concubinages, sa barbarie ?

 

C’est Frédéric 1er Barberousse qui obtient de l’anti-pape Pascal III la canonisation de Charlemagne, le 29 décembre 1165. Le pape Alexandre III, ni aucun successeur ne vont aller à l’encontre de cette décision. Charlemagne a un culte local à Aix-la-Chapelle, où ses reliques sont enchâssées. Le peuple l’a reconnu comme saint. Une tolérance s’installe autour de la Saint Charlemagne. Charles V, roi de France, veut faire de l’empereur, à côté de saint Louis, le saint patron de la maison royale. Jeanne d’Arc a dit à Charles VII : « Saint Louis et saint Charlemagne sont à genoux devant Lui, faisant sa prière pour vous ». Louis XI fait de la Saint-Charlemagne un jour férié (célébré comme un dimanche sous peine de mort). C’est au XVIe siècle que Charlemagne disparaît de l’ordo et du Bréviaire. Son culte n’est plus intégré dans la liturgie. En 1661, la Sorbonnele choisit comme patron. En 1734, le futur Benoît XIV écrit : « Rien ne s’oppose, semble-t-il , à ce que le culte de Charlemagne soit célébré dans les Églises particulières. » Dans un traité, il précise que cette tolérance assure à Charlemagne le titre de bienheureux. Le pape Pie IX en 1850, dans une lettre au Cardinal de Geissel, archevêque de Cologne, prohibe l’extension du culte. Les pèlerins viennent donc l’honorer et le prier à Aix-la Chapelle et à Metten. En France, la solennité est maintenant purement civile. Dom Guéranger mentionne très longuement Charlemagne dans son année liturgique (voir plus bas).

Jusqu’à la fin du VIIIe siècle, la terre saxonne résiste de toutes ses forces aux influences romaines, franques, ou chrétiennes. C’est même le point de départ de nombreuses incursions barbares à l’origine d’une instabilité régionale. Avec l’assentiment de Charlemagne, l’évangélisation commence avant 770. Mais en vain, car les missionnaires se font tuer. Avec l’accord du clergé, des officiers et des principaux monastères, Charlemagne lance une expédition de démonstration de force contre les Saxons. C’est un échec. Sous la direction de leur chef Witukind (selon la tradition aïeul de Robert le Fort et aïeul de sainte Mathilde), les barbares retournent à leurs idoles et à leurs pillages. En 782, Charlemagne décide alors une répression exceptionnelle. C’est à ce moment que se situe ce que certains historiens appellent le massacre de Verden sur l’Aller, où quatre mille cinq cents Saxons sont livrés à Charlemagne par les chefs saxons et décapités. Le fait est exact. Il faut ajouter le motif de leur condamnation : après enquête, jugés traîtres pour avoir renié leur baptême et trahi les chefs à qui ils s’étaient soumis. Précisons de plus qu’il s’agit aussi d’un véritable procès selon des procédures propres à la justice militaire de l’époque. L’exemplarité est recherchée pour mettre fin à de nombreuse années de désordre dans cette région. Il est clair que la mentalité de l’époque, encore peu civilisée, préfère la violence. Charlemagne a certainement conscience de son rôle providentiel de combattant pour la foi. Il cherche à conquérir des nations, non pour la puissance seulement, mais surtout pour les convertir toutes entières à Dieu.

Dans le Capitulaire de Saxe (Capitulatio de partibus Saxoniae), publié peu de temps après, Charlemagne édicte que seront punis de mort les incendiaires, les traîtres, les meurtriers, et tout saxon qui refusera le baptême, ou refusera la loi du jeûne, après examen d’un prêtre. Heureusement, Alcuin et le pape Hadrien s’adressent alors à Charlemagne pour lui préciser : « la foi est un acte de volonté et non de contrainte. Il est permis de solliciter la conscience, non de la violenter. Qu’on envoie aux saxons des prédicateurs et non des brigands » (Alcuin).

[En 797, Charlemagne instaure un nouveau capitulaire plus clément que le précédent, le capitulare Saxonicum. La peine de mort contre les païens y est abolie et commuée en amendes. Les troubles cessent progressivement vers 799.]

Malgré Verden et le Capitulaire, les Saxons redoublent de fureur, une guerre sans pitié s’ensuit. En 785, les deux nations sont épuisées. Charlemagne offre la paix à Witukind qui demande et reçoit le baptême à Attigny, choisissant Charlemagne comme parrain. La tradition veut que Witukind soit converti par Dieu lui-même lors d’un miracle opéré dans la sainte Eucharistie. Witukind reconstruit les églises qu’il avait abattues et en fait édifier de nouvelles. Il meurt en 804 lors d’une guerre contre les Suèves. Des églises particulières l’honorent comme un saint le 7 janvier.

Ary Scheffer, Charlemagne reçoit la soumission de Widukind à Paderborn, (1840)

Ary Scheffer, Charlemagne reçoit la soumission de Widukind à Paderborn, (1840)

Charlemagne a compris les raison de son échec, il propose la paix en garantissant le respect de certaines coutumes saxonnes. Ainsi il leur permet de vivre librement la naissance de la civilisation chrétienne. L’Église et les nombreux moines ou saints courageux de ces temps ont fait beaucoup. Citons saints Liadwin, Sturm, Willehad et Liudger.

Charlemagne doit être considéré comme un grand bienfaiteur de l’Église et de la civilisation. Il arrête pour toujours l’invasion des Barbares et assure une paix durable. En 799, il sauve le pape Léon III. Il s’inspire de la Cité de Dieu de saint Augustin pour concevoir la loyauté et le service de chacun. Il fait passer la réforme des mœurs avant celle des lois. Les marchés publics et les foires coïncident avec des fêtes religieuses, ce qui développe le commerce. Il décide la création d’un hôpital, à côté de chaque monastère, ainsi que la création d’une école gratuite dans chaque paroisse, pour serfs et hommes libres.

Devenu empereur d’Occident, Charlemagne sait respecter le principe naissant de l’indépendance du pouvoir temporel et du pouvoir spirituel. Il s’intitule « le défenseur et l’auxiliaire de la sainte Église dans tous ses besoins ». Il rend aux papes les plus grands honneurs, respecte leur autorité venant de la foi et cherche à transmettre la foi dans la société. « Nous savons, dit un capitulaire de Charlemagne, que, suivant la tradition des saints Pères, les biens d’Église, don de la piété des fidèles et prix de la rédemption de leurs péchés, sont les patrimoines des pauvres. Nous statuons donc que jamais, ni sous notre règne, ni sous celui de nos successeurs, il ne sera permis de rien soustraire, de rien aliéner de ces biens sacrés. »

(Triste Ripoublique de nos jours ! qui ne peut (veut !!!) se considérer parmi ses successeurs…)

Charlemagne est aussi le protecteur des Lieux saints. Le calife de Bagdad, Haroun-Al-Raschid, lui envoie les clefs du Saint-Sépulcre et l’étendard de Jérusalem.

L'Hommage de Haroun Al-Rashid à Charlemagne par Jacob Jordaens

L'Hommage de Haroun Al-Rashid à Charlemagne par Jacob Jordaens

 

Bienheureuse Hildegarde Burjan : fondatrice des Sœurs de la Caritas SocialisOn reproche cependant à Charlemagne ses mœurs privées. On peut compter neuf femmes ; le veuvage n’explique pas tout et la répudiation est certainement à l’origine de quelques changements d’épouse, les principes sur les empêchements de mariage sont encore trop flottants. Nous n’avons aucune trace de contemporains de Charlemagne le blâmant. Le premier sera Walafrid Strabon au milieu du IXe siècle. L’hagiographie retient sa troisième femme, la bienheureuse Hildegarde, née en 757, morte en 783, mère de huit enfants, et fêtée le 30 avril. Elle est un exemple de vertu chrétienne pour la cour et sa famille. Elle fait un don important à l’abbaye de Saint-Arnoul de Metz, où elle est entérée selon ses vœux ; L’abbé de Kempten (lieu où a été transférée une partie de ses reliques) écrit sa vie en 1472, narrant de nombreuses guérisons vérifiées et survenues sur sa tombe.

Quant à Charlemagne, il n’a ni barbe fleurie, ni la voix de tonnerre, ni le regard terrible, mais le ventre proéminent, une voix perçante et grêle pour son corps robuste.

Charlemagne est un souverain chrétien dont l’apport à la civilisation européenne est indéniable et encore visible aujourd’hui.

 

Tiré du livre « Les Saints de souches royales » Des Chrétiens Bienheureux du Seigneur d’Étienne Lelièvre, Édition Le Sarment Fayard

Bienheureux Charlemagne, quelques justifications de Dom Guéranger.

 

2014 voit le douzième centenaire de la mort du Bienheureux Charlemagne. L’événement n’est pas anodin en Allemagne et dans les régions nordiques qui ont gardé un souvenir vivace de l’empereur Très-Chrétien comme un concile de Mayence (Mainz) lui en donna le titre.

C’est d’abord le titre de Bienheureux qui retiendra notre attention. L’Histoire nous apprend que « le respect des peuples était déjà préparé en faveur de la sainteté de Charlemagne, lorsque Frédéric Barberousse fit rendre le décret de sa canonisation par l’antipape Pascal III, en 1165 : c’est pourquoi le Siège Apostolique, sans vouloir approuver une procédure irrégulière, ni la recommencer dans les formes, puisqu’on ne lui en a pas fait la demande, a cru devoir respecter ce culte en tous les lieux où il fut établi. Cependant, les nombreuses Églises [diocèses] qui honorent, depuis plus de sept siècles, la mémoire du grand Charles, se contentent, par respect pour le Martyrologe Romain où son nom ne se lit pas, de le fêter sous le titre de Bienheureux.

« Avant l’époque de la Réforme [protestante], le nom du Bienheureux Charlemagne se trouvait sur le calendrier d’un grand nombre de nos Églises de France ; les Bréviaires de Reims et de Rouen l’avaient conservé jusqu’à nos jours. L’Église de Paris le sacrifia, de bonne heure, aux préjugés des Docteurs dont les opinions avancées se manifestèrent dans son Université, dès la première moitié du XVIe siècle. La Réforme avait conçu de l’antipathie contre un homme qui avait été la plus magnifique et la plus complète représentation du Prince catholique ; et ce fut bien moins le défaut d’une canonisation en règle que l’on mit en avant pour effacer du calendrier le nom de Charlemagne, que la prétendue licence de ses mœurs, dont on affecta de relever le scandale. Sur cette question comme sur bien d’autres, le sentiment public se forma à la légère ; et nous ne nous dissimulons pas que les personnes qui se sont le moins occupées d’étudier les titres de Charlemagne à la sainteté, seront les plus étonnées de trouver son nom dans cet ouvrage.

« Plus de trente Églises, en Allemagne, célèbrent encore aujourd’hui la fête du grand Empereur ; sa chère Église d’Aix-la-Chapelle garde son corps et l’expose à la vénération des peuples. Les Vies des Saints publiées en France, même celle de Baillet et de Godescard, n’ont point été infidèles à sa mémoire. Par un étrange retour, l’Université de Paris le choisit pour son Patron en 1661 ; mais sa fête, qui était abrogée depuis plus d’un siècle, ne se releva que comme solennité civile, sans aucune mention dans la Liturgie.

« Il n’entre point dans le plan de cet ouvrage de discuter les raisons pour lesquelles un culte a été attribué aux Saints sur lesquels nous réunissons les éloges liturgiques ; on ne doit donc pas attendre de nous une démonstration en forme de la sainteté de Charlemagne. Cependant nous avouerons, en passant, que nous inclinons avec Bossuet, dont la sévérité en morale est assez connue, à croire que les mœurs de Charlemagne furent toujours pures, et que le préjugé contraire, qui n’a pour lui que quelques textes assez vagues et contradictoires de certains auteurs du moyen-âge, a dû ses développements à la malheureuse influence de l’esprit protestant. » (Dom Prosper Guéranger, L’Année liturgique, Le Temps de Noël, T. II, 13e éd., H. Oudin, Paris – 1901).

Il faut lire les développements du célèbre liturgiste pour compléter cet aperçu. Quant à la fin si édifiante de la vie du Bienheureux, en voici des éléments :

Le Couronnement de la Vie de Charlemagne

 

« Enfin la soixante-huitième année de son âge, après avoir fait couronner et élire roi Louis, son fils, il se donna tout entier à la prière et à l’aumône. Sa coutume était de se rendre à l’église le matin et le soir, souvent même aux heures de la nuit, car ses délices étaient d’entendre le chant grégorien qu’il établit le premier en France et en Germanie, après avoir obtenu des chantres [du Pape] Adrien VI. Il eut soin aussi de faire transcrire en tous lieux les hymnes de l’Église. Il écrivit les Évangiles de sa propre main et les collationna sur les exemplaires grecs et syriaques. Il fut toujours très sobre dans le boire et le manger, ayant coutume de traiter les maladies par le jeûne, qu’il prolongea quelquefois jusqu’à sept jours. (…) » (L. Du Broc de Segange, Les Saints Patrons des Corporations et protecteurs, T. Ier, p. 85, Bretnacher, Paris – s.d. [1887])

Source : Abbé Jacques-Marie Seuillot. (http://www.cassicia.com)

 

* * *

 

Sur le culte rendu à Charlemagne, voici ce que nous dit dom Guéranger, en son Année liturgique.

 

Au gracieux souvenir de la douce martyre Agnès, un grand nombre d’Églises, surtout en Allemagne, associent aujourd’hui (28 janvier) la mémoire imposante du pieux Empereur Charlemagne. Le respect des peuples était déjà préparé en faveur de la sainteté de Charlemagne, lorsque Frédéric Barberousse fit rendre le décret de sa canonisation par l’antipape Pascal III, en 1165 : c’est pourquoi le Siège Apostolique, sans vouloir approuver une procédure irrégulière, ni la recommencer dans les formes, puisqu’on ne lui a jamais demandé, a cru devoir respecter ce culte en tous les lieux où il fut établi.

Dans nos églises de France nous ne nous faisons aucun scrupule de donner le titre de saints et d’honorer comme tels un nombre considérable d’évêques sur la sainteté desquels aucun décret n’a été rendu par personne et dont le culte n’est jamais sorti de la limite de leurs diocèses ; les nombreuses églises qui honorent, depuis près de sept siècles, la mémoire du grand empereur Charlemagne, se contentent, par respect pour le Martyrologe romain, où son nom ne se lit pas, de le fêter sous le titre de Bienheureux. ­ Pour ne citer qu’un exemple, une église lui est encore dédiée dans l’ancien diocèse de Sarlat, en Périgord.

Avant l’époque de la Réforme, le nom du bienheureux Charlemagne se trouvait sur le calendrier d’un grand nombre de nos églises de France ; les Bréviaires de Reims et de Rouen sont les seuls qui l’aient conservé aujourd’hui. Plus de trente églises en Allemagne célèbrent encore aujourd’hui la fête du grand empereur ; sa chère église d’Aix-la-Chapelle garde son corps et l’expose à la vénération des peuples. Il est conservé dans une châsse en vermeil. Un de ses bras est dans un reliquaire à part. On trouve dans la grosseur des os de ce bras la preuve de ce que les auteurs racontent sur la haute taille et la force corporelle du grand empereur. Dans le trésor de la même église se trouve aussi son cor de chasse, et dans une galerie, le siège de pierre sur lequel il était assis dans son tombeau.

Relief de la châsse de Charlemagne

Relief de la châsse de Charlemagne
Aix-la-Chapelle
1200 - 1215

On sait que c’est sur ce siège que les empereurs d’Allemagne étaient installés, le jour de leur couronnement.

L’Université de paris le choisit pour patron en 1661.

Plusieurs Martyrologues de France, d’Allemagne et de Flandre font mémoire de saint Charlemagne le 28 janvier. Ferrarius ne l’a pas oublié dans son supplément des Saints qui ne sont pas dans le Martyrologe romain, non plus qu’Usuard, ni Molan. Nous avons tiré ce que nous en avons dit en ce recueil, d’Eginhard, qui a été son chancelier et qui se fit religieux de l’Ordre de Saint-Benoît, après la mort de son maître, et des autres mémoires que Bollandus rapporte dans le second tome des Actes des Saints, où l’on peut voir quelques miracles qui ont été faits par les mérites de notre saint roi. Sur la vie de saint Charlemagne, on peut encore consulter ce qu’en a écrit le bienheureux Notker, moine de Saint-Gall, au IXe siècle.
Tiré du Petit Bollandiste tome II p. 84

Tiré du livre « Les Sacres des Rois de France » de Rémy de Bourbon Parme, d’Alexandre Loire et de Georges Bernage ­; Éditions Heimdal

Antienne

Espoir des affligés, terreur des ennemis, douceur pour les vaincus, règle de vertu, sentier du droit, forme du salut, ô Charles, recevez les pieux hommages de vos serviteurs.

Parmi les Séquences consacrées à notre grand Empereur, nous trouvons la suivante, extraite d’un ancien Missel d’Aix-la-Chapelle.

SÉQUENCE

Cité d’Aix, cité royale, siège principal de la royauté, palais préféré de nos princes ;
Chante gloire au Roi des rois, aujourd’hui que tu célèbres la mémoire du grand roi Charles.
Que notre chœur chante dans l’allégresse, que le clergé fasse entendre le mélodieux accord des voix.
Quand la main est occupée aux bonnes œuvres, le cœur médite douce psalmodie.
En ce jour de fête, que l’Église honore les grands gestes du grand Roi.
Rois et peuples de la terre, que tous applaudissent d’un concert joyeux.
Charles est le fort soldat du Christ, le chef de l’invincible cohorte ; à lui seul il renverse dix mille combattants.
De l’ivraie il purge la terre ; il affranchit la moisson, en sarclant de son glaive cette herbe maudite.
C’est là le grand Empereur , bon semeur d’une bonne semence, et prudent agriculteur.
Il convertit les infidèles, il renverse temples et dieux ; sa main brise les idoles.
Il dompte les rois superbes, il fait régner les saintes lois avec la justice ;
La justice : mais il lui donne pour compagne la miséricorde.
Il est sacré de l’huile de liesse, par un don de grâce, plus que tous les autres rois.
Avec la couronne de gloire, il reçoit les insignes de l’Impériale Majesté.
Ô Roi triomphateur du monde, toi qui règnes avec Jésus-Christ, ô père saint ! ô Charles ! sois notre intercesseur ;
Afin que, purs de tout péché, dans le royaume de la lumière, nous, ton peuple, soyons les habitants du ciel avec les bienheureux.
Étoile de la mer, ô Marie, salut du monde, voie de la vie ! dirige nos pas vacillants et donne-nous accès auprès du Roi suprême, dans la gloire sans fin.
Ô Christ ! splendeur du Dieu Père, fils de la Mère immaculée, par ce Saint dont nous fêtons le jour, daigne nous accorder l’éternelle joie.
Amen.

Nous conclurons les hommages rendus par les diverses Églises au Bienheureux Charlemagne, en donnant ici la Collecte de sa fête.

Prions

Ô Dieu, qui, dans la surabondante fécondité de votre bonté, avez décoré du manteau de la glorieuse immortalité le bienheureux Empereur Charlemagne , après qu’il a eu déposé le voile de la chair : accordez à nos prières de mériter pour pieux intercesseur dans les cieux, celui que vous avez élevé sur la terre à l’honneur de l’Empire, pour la propagation de la vraie foi. Par Jésus-Christ notre Seigneur. Amen.

Salut, ô Charles, bien-aimé de Dieu, Apôtre du Christ, rempart de son Église, protecteur de la justice, gardien des mœurs, terreur des ennemis du nom Chrétien ! Le diadème souillé des Césars, mais purifié par les mains de Léon, couronne votre front auguste ; le globe de l’empire repose en votre forte main ; l’épée des combats du Seigneur, toujours victorieuse, est suspendue à votre baudrier ; et l’onction impériale est venue s’unir à l’onction royale dont la main du Pontife avait déjà consacré votre bras puissant. Devenu la figure du Christ dans sa royauté temporelle, vous avez voulu qu’il régnât en vous et par vous. Il vous récompense maintenant de l’amour que vous avez eu pour lui, du zèle que vous avez montré pour sa gloire, du respect et de la confiance que vous avez témoignés à son Épouse. Pour une royauté de la terre, caduque et périssable, vous avez reçu une royauté immortelle, au sein de laquelle tant de millions d’âmes, arrachées par vous à l’idolâtrie, vous honorent comme l’instrument de leur salut.

Dans ces jours où nous célébrons le divin enfantement de la Reine des deux, vous lui présentez le temple gracieux et magnifique que vous élevâtes en son honneur, et qui fait encore sur la terre notre admiration. C’est dans ce saint lieu que vos pieuses mains placèrent les langes de son divin Fils ; en retour, l’Emmanuel a voulu que vos ossements sacrés y reposassent avec gloire, afin d’y recevoir les témoignages de la vénération des peuples. Glorieux héritier de la foi des trois Rois de l’Orient, présentez-nous à Celui qui daigna revêtir ces humbles tissus. Demandez pour nous une part de cette humilité avec laquelle vous aimiez à vous incliner devant la crèche, de cette pieuse joie que goûtait votre cœur dans les solennités que nous célébrons, de ce zèle ardent qui vous fit entreprendre tant de travaux pour la gloire du Fils de Dieu, de cette force qui ne vous abandonna jamais dans la recherche de son Royaume.

Puissant Empereur, qui fûtes autrefois l’arbitre de la famille européenne réunie tout entière sous votre sceptre, prenez en pitié cette société qui s’écroule aujourd’hui de toutes parts. Après mille ans, l’Empire que l’Eglise avait confié à vos mains est tombé : tel a été le châtiment de son infidélité envers l’Église qui l’avait fondé. Mais les nations sont restées, et s’agitent dans l’inquiétude. L’Église seule peut leur rendre la vie par la foi ; seule, elle est demeurée dépositaire des notions du droit public ; seule, elle peut régler le pouvoir, et consacrer l’obéissance. Faites que le jour luise bientôt, où la société rétablie sur ses bases cessera de demander aux révolutions l’ordre et la liberté. Protégez d’un amour spécial la France, le plus riche fleuron de votre splendide couronne. Montrez que vous êtes toujours son Roi et son Père.

Arrêtez les progrès des faux empires qui s’élèvent au Nord sur le schisme et l’hérésie, et ne permettez pas que les peuples du Saint Empire Romain deviennent à jamais leur proie.

 

* * *

 

La Sainte Tunique / Charlemagne

 

La Sainte Tunique arrive à Argenteuil

 

Tunique_d_Argenteuil_1_La Sainte Tunique devient l’objet d’un cadeau extraordinaire que l’impératrice d’Orient, Irène, fait au tout nouvel empereur, d’Occident, Charlemagne, en l’an 800. Au lieu de confier la relique à une église ou à une cathédrale connue, la donna à garder à une de ses filles, Théodrade, religieuse dans une abbaye, fondée en 655, à Argenteuil et qui était réservée à des personnes de marque. La Sainte Tunique aurait été déposé dans ce monastère par l’Empereur lui-même, à une heure de l’après-midi. Et depuis lors, les cloches du lieu tintaient à ce moment même, en souvenir de l’événement. Une peinture murale, que l’on peut voir à gauche de l’autel de la Tunique rappelle cette première « translation ».